“Il y a une situation et c’est très bien qu’on s’y penche”, déclarait Georges Geeraerts, le Président du groupement des exportateurs, dans nos colonnes, la semaine dernière. Juste après, à l’issue d’une réunion avec les représentants des 88 exportateurs, le Président Rajoelina a décidé de ne pas modifier le prix plancher à l’export, 250 dollars, dans le cadre de la campagne de vanille, débutée le 15 novembre.
L’enjeu de base, ce sont les faibles ventes. Le pays a exporté environ 250 tonnes de vanille à ce jour contre plus de 850 sur les années précédentes, en moyenne. Ces exportations en berne pénalisent le marché intérieur. Les gousses de vanille sont bradées. Très peu de personnes achètent au prix qui a été fixé par l’Etat, à savoir 75 000 ariary pour la vanille verte et 450 000 ariary pour la vanille noire.
Pour le Groupement des exportateurs de vanille de Madagascar (GEVM), dans un communiqué, cette décision du maintien des prix doit être “assortie du maintien et du contrôle strict des prix minimum de vrac et de verte, ceci dans l’intérêt des tous les acteurs et en premier lieu les planteurs. Ce prix aux planteurs devrait être révisé à la hausse pour la prochaine notamment en prenant compte de la valeur de l’ariary au moment de cette campagne.”
Aujourd’hui, la vanille verte est plutôt vendue 40 000 ariary, voire moins. “Je ne comprends pas ces prix plancher d’achat. Sachant qu’il faut 5 kilos de vanille verte pour faire un seul kilo de vanille noire, si on achète à 75 000 ariary, on perd forcément de l’argent”, peste un producteur de la côte est.
Mais le maintien des 250 dollars n’est la seule décision de l’Etat. Le gouvernement a déclaré aussi que “les exportateurs s’engagent plus particulièrement, dans un délai de 15 jours, à procéder à l’achat effectif de la totalité de la quantité de vanille autorisée dans leurs agréments. En cas de défaillance ou de manquement de leur part, la quantité restante non achetée sera réattribuée par l’Etat au profit des autres exportateurs et fera l’objet d’un nouvel agrément.”
Or, pour le GEVM, “les opérateurs agréés ne se sont jamais engagés à réaliser un tonnage minimum. Ils sont de plus dans l’incapacité de réaliser des achats en l’absence de trésorerie, de possibilité de financements et de visibilité sur les ventes à l’extérieur”.
De son côté, l’Etat s’engage également à effectuer un “road show” avec les exportateurs pour être visible et séduire les potentiels acheteurs internationaux. Une initiative qui réjouit vraisemblablement le GEVM, même si ce “road show” se doit d’être mûrement réfléchi et dûment préparé et le groupement a fait savoir que les opérateurs sont prêts à mettre toutes leurs compétences et leur expérience.
Mais ce tour devrait être précédé, selon les exportateurs, par “l’assainissement de la filière”. Le GEVM, à ce propos, s’étonne : “Il nous est difficile de comprendre qu’aucune sanction n’a été prise ou communiquée alors qu’il est de notoriété publique que de nombreux contrevenants sont encore à la manœuvre (15% des exportations de cette nouvelle campagne comporteraient des anomalies graves et flagrantes !).” Le GEVM fait également part de son souhait pour mettre en place une task force chargée des contrôles “en lieu et place des mesures contraignantes et inefficaces évoquées ou déjà mises en place.”
Enfin, l’Etat a ouvert la voie à la vente de vanille low cost et low qualité, pour séduire visiblement de nouveaux segments de clientèle. “Afin de garder la place de Madagascar de leader mondial de la vanille et pour faire face à la concurrence mondiale, les exportateurs seront autorisés à écouler sur le marché international de la vanille “cuts”, c’est-à-dire avec un taux de vanilline inférieur à celui de la vanille “gourmet”, et ce jusqu’à hauteur de 10% de la quantité autorisée par les agréments délivrés. Il a été unanimement décidé que le prix de la vanille “cuts” sera de 140 dollars par kilo”, a déclaré l’Etat.
Face à cela, le GEVM attend une définition précise des « cuts » et déclare que cette disposition n’est envisageable que si des contrôles stricts sont en place, ce qui semble être “illusoire” pour l’heure. “Ce différentiel n’aboutira qu’à une confusion, ne servira les intérêts que des contrevenants en pénalisant les acteurs (exportateurs et importateurs) vertueux. Cette mesure tirera le prix de la vanille vers le bas sans espoir de retour !”, écrit le GEVM.
Tiana Ramanoelina et
Emre Sari