Mercredi des idées en goguette: Entre foi et loi

Il peut vraiment s’en passer des vertes et des pas mûres derrière les enceintes d’une école. Les faits ne le contrediront pas, notamment quand, il n’y a pas si longtemps, l’élève d’un lycée de la capitale qui aurait perdu un téléphone portable haut de gam­me, et donc de grande valeur, en est venue à porter plainte contre un professeur. L’affaire a fait grand bruit, au point qu’elle a déchaîné une mobilisation des enseignants de toute la circonscription scolaire. Et puis, voilà que des élèves du collège et du lycée d’une localité ont refusé, pour des raisons religieuses, d’entonner l’hym­ne national, un motif de renvoi d’après les res­ponsables de ces établissements. Mal leur en a pris puisque la Justice leur aurait intimé de revenir sur leur décision et grevé une amende.

Les débats s’animent, s’enflamment autour de ce cas. Mais le sujet se complique quand tout le monde s’y engouffre, fort de ses préjugés, convictions, foi et vécus personnels, religion… et pas qu’au pays puisqu’en France par exemple, il reste vivace malgré une loi sur la laïcité datant de 2004 concernant le port de signes et tenues religieux. Les discussions prennent encore une autre tournure lorsqu’elles concernent des tenues jugées inappropriées ou provocantes de certains élèves.

La Constitution malgache, elle, prévoit notamment que « L’Etat affirme sa neutralité à l’égard des différentes religions » et que « L’Etat et les institutions religieuses s’interdisent toute immixtion dans leurs domaines respectifs ». Un pacte de non-agression entre les deux entités. Dans les établissements privés confessionnels, quels qu’ils soient, quand il est question de culte par exemple, il ne devrait normalement rien y avoir à redire dès lors que l’on y a inscrit son enfant, même si l’on n’est pas de la même confession. Ou que l’on n’ait au­cune. De la même façon, un certain nombre de règles prévalent dans les établissements publics. Le fait de chanter l’hymne national constitue-t-il un carcan entravant la liberté religieuse des concernés, ou un acte de respect envers les valeurs et symboles de la République que tout citoyen, sans exception, devrait accomplir ? Si ce n’est pas encore fait (du moins, la ministre de l’Edu­cation nationale évoque encore un sursis à exécution et non un jugement définitif), la Justice aura la tâche de trancher sur la question et son verdict fera office de jurisprudence. Avec la possibilité notamment de laisser la porte ouverte à des actes de désobéissance, au niveau des écoles ou ailleurs, que les auteurs défendront ou justifieront par leur conviction religieuse.

Jamais responsables

Dans tous les cas, l’éducation a bien changé. Au nom de principes qui seraient universels ou plus conformes aux droits hu­mains, on devient plus permissif ou tolérant, c’est selon. Des modes d’éducation qui étaient autrefois privilégiés et qui leur ont réussi selon des parents, leur vaudraient aujourd’hui des remontrances de l’opinion publique, voire des poursuites judiciaires sous d’autres cieux.

Mais quoi qu’il en soit, pour que de tels faits se produisent, la responsabilité des parents n’est certainement pas à exclure. En effet, pour une quelconque raison, de conviction politique entre autres, certains en oublient l’essentiel. Comme lorsqu’une mesure de suspension des cours est décrétée pour cause de cyclone, on trouve toujours à redire alors que les jours d’arrêt correspondent à des journées des écoles suivies de la pause bimestrielle habituelle. Les responsables régionaux de l’éducation n’auraient rien décidé que cela n’y aurait rien changé : les critiques auraient encore fusé des mêmes personnes qui auraient crié au scandale quant à une prétendue mise en danger de leurs enfants.

Et puis il y a ceux qui mettent tout sur le compte du système éducatif et l’absence de matières com­me l’instruction civique du programme scolaire pour expliquer les incivilités constatées ici et là. Pour autant, il s’agit clairement d’une fuite, sinon un déni des responsabilités qui incombent au cercle familial. Certaines, si ce n’est de nombreuses valeurs doivent être en effet apprises au sein de la famille, le premier noyau social dans lequel chaque être humain évolue. En l’occurrence, le langage, la propreté et le savoir-vivre… qui ne s’enseignent pas à l’école mais incombent à la famille. Il y a enfin ceux qui, pétris des mêmes convictions politiques, vont encore plus loin et soutiennent que « l’exemple vient d’en haut ». A supposer que ce soit le cas, qu’on se le dise : quand ce n’est ostensiblement pas le bon, ceux qui le suivent sont aussi fautifs que ceux qui le donnent. Tandis que d’autres insinuent que tout cela résulte d’une faillite de l’éducation.

Tant que l’on continuera de nourrir cette faculté de ne jamais se sentir res­ponsable de quoi que ce soit et de rejeter continuellement les torts sur les autres, attendant qu’ils fassent le travail qui nous échoit, il ne sert à rien d’espérer que les mentalités évoluent, ni qu’un quel­conque développement survienne.

N.R.

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