Mercredi des idées en goguette: Terrain miné

Il s’en passe, des choses du côté du parlement, plus particulièrement au sein de l’Assemblée nationale… Ou pas. A vrai dire, c’est le calme plat en ce moment au sein de cette institution, à croire que la session parlementaire ordinaire n’a toujours pas commencé.
Or c’est pourtant bel et bien le cas. Et les choses sérieuses ont bel et bien commencé au niveau des textes, en l’occurrence le projet de nouveau Code mi­nier. Sans préjuger de la teneur du texte, l’idée est notamment que celui-ci établisse les nouvelles règles du jeu à appliquer dans le secteur extractif, les conditions d’investissement, les montants et le mode de répartition des redevances et ristournes minières… Bref, un sujet d’importance pour n’importe quel opérateur, responsable, représentant des collectivités territoriales décentralisées, voire citoyen lambda, en ce que ce texte devrait normalement changer un tant soit peu le secteur, mais aussi le futur des ressources publiques et des régions concernées. Mais apparemment du menu fretin pour les députés… 35.
Ils étaient donc moins d’une quarantaine sur les plus de 100 membres de cette institution à avoir adopté le nouveau Code minier.
Des députés qui n’en sont certainement pas à leur premier coup d’essai en la matière. Les sessions se suivent et se ressemblent et les appels du pied, coups de gueule ou menaces de sanctions n’y font rien : l’absentéisme fait loi dans les travées de la chambre basse. L’année dernière déjà, une dizaine de députés seulement ont daigné faire le déplacement pour se pencher sur des projets de texte tels que l’orientation générale du système éducatif à Ma­dagascar… Mais quand il est question de motion de censure contre le gouvernement, le quota d’une centaine de signatures collectées aurait miraculeusement été atteint. Ou quand c’est pour discuter d’indemnités et autres avantages, l’hémicycle se remplit comme par enchantement.
Les absents ont toujours tort, dit-on mais cela en dit long sur l’importance que ces parlementaires accordent à la question. Amendé ou non, et quoique le processus démocratique fonctionne ainsi, d’aucuns considèrent cette loi comme mal votée.

Peu incitatif

Mal votée, ou mal conçue ? Dans tous les cas et pour entrer dans la teneur du nouveau Code, des voix commencent déjà à s’élever quand à l’incongruité, sinon l’inopportunité de certaines dispositions. Les autorités en charge des mines successives se sont enorgueilli que les consultations ont été les plus élargies possibles et pourtant, la Chambre des mines, une sommité nationale dans le do­maine, s’est déjà fait entendre pour remettre en question la hausse jugée exorbitante des redevances et ristournes minières.
D’une manière générale, beaucoup a été dit, à tort et fréquemment à travers, en ce qui concerne les investissements miniers menés au pays, en particulier au sujet des apports en termes de redevances et ristournes que ceux-ci devraient apporter à l’Etat. D’au­cuns n’en finissent pas de s’offusquer du niveau des parts que doivent les grands opérateurs mi­niers à l’Etat, faisant… mine parfois de ne pas prendre en considération les autres apports et valeur ajoutée que drainent ces activités, en l’occurrence toute la pléiade de taxes dont ils doivent s’acquitter. Il y a également les déficits en infrastructures, de telle sorte que tout opérateur qui s’implante doit lui-même investir considérablement avant de pouvoir mener ses activités, notamment dans les
routes, l’énergie… Sans compter les soi-disant contestations de populations locales qui se soldent parfois par des indemnités qui saignent à blanc l’opérateur con­cerné. Ou qui empêchent un autre de commencer son exploitation, alors même que la région où il est implanté souffre d’un cruel déficit de développement depuis des décennies et s’est même vue affubler la triste réputation de cimetière de projets.
Le secteur se trouve sous le coup d’un cadre juridique clair, datant certes d’il y a quelques années mais qui s’applique toujours jusqu’à présent et qui, à l’origine, avait été conçu, non seulement pour les intérêts du pays mais aussi dans un esprit qui se voulait incitatif pour les opérateurs. Avec tous les évènements de ces dernières années et plus récemment, de ces derniers jours, il y a vraiment lieu de s’interroger sur le signal que le pays envoie aux potentiels investisseurs. Et de se demander s’il ne s’engage pas, à ce niveau, sur un… terrain miné.

N.R.

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