9e art : les bédéistes pleurent Ndrematoa

L’auteur de bande dessinée, Dieudonné Rakotonomenjanahary, plus connu sous son nom de plume, Ndrematoa, s’est éteint samedi à l’âge de 67 ans.

«Ndrematoa a été admis à l’hôpital Joseph Ravoa­han­gy Andrianavalona, le 7 no­vembre à la suite d’un malaise cardiaque. Il a rendu son dernier souffle dans l’après-midi de samedi», confie Ra­fal­ly Razafindrakoto, bé­déiste, ajoutant qu’un ultime hommage lui sera rendu ce mercredi à l’Ecar Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus Isotry, avant ses funérailles à Andranonahahaka Anjepy.
Passionné de dessin de­puis sa prime jeunesse, Ndre­matoa gribouillait déjà avec un morceau de charbon à l’âge de six ans. Au­todidacte, il a su inventer et parfaire sa technique uni­que en son genre, celle de tracer les silhouettes à partir des ombres avant de parfaire ses œuvres.

Un riche parcours
professionnel
A l’orée des années 80, il travaillait pour le compte du quotidien Atrika et de l’hebdomadaire Vaovao, en qualité de caricaturiste, tout en publiant des séries de BD. Des publications périodi­ques comme la revue Capri­corne et l’album Ci­tron, faisaient également ap­pel à ses talents reconnus mondiallement. Ndrematoa décrochait le Premier Prix du Festival de la BD avec «Cap sur l’île Bourbon», à l’occasion d’un Concours organisé par le CCAC (ac­tu­el IFM). En 1986, Richard Rabesandra­tana et lui ont représenté Mada­gascar qui a participé pour la première fois au Salon International de la bande dessinée d’Angoulême (France).
Ses planches ont également remporté le Prix du public lors de l’événement national «Gasy Bulles 2008». Selon sa bibliographie, Ndre­matoa compte plusieurs parutions à titres personnel et collaboratif, pour ne citer que «Tana blues» (2013), «Polifika» (2015) et «La Porte du Sud» (2020).

Une montagne
La disparition de ce géant de la BD, n’a pas laissé de marbre le monde du 9e art. Andry Patrick Rakoton­drazaka salue un «bédéiste hors pair, qui incarne selon moi à la perfection la bande dessinée malgache dans toute sa splendeur, Ndrema­toa était un modèle, voire une véritable icône pour toute une génération adepte du 9e art à Madagascar. Par son talent, il a représenté plus d’une fois les couleurs du pays à travers divers festivals de bande dessinée à l’étranger. Il nous a également inspirés à valoriser cet art, malgré les difficultés rencontrées. Il savait conjuguer Passion et Patience. Cet artiste prenait à chaque fois son temps, pour sublimer les petits détails dans chacune de ses planches, assis dans son coin».
«Ndrematoa, c’était une grande montagne, à la silhouette unique et en même temps si discrète qu’on oubliait qu’elle était là. Mais un jour, alors que tu ouvres ta fenêtre, la montagne a disparu et le paysage parait bien vide d’un seul coup… Il y a quelques années, j’ai eu la chance de colorer quelques-unes de ses pages, à l’occasion d’une expo. Je débutais à peine au sein des groupes et ateliers et l’idée de travailler sur les pages de ce grand monsieur me mettait un peu la pression. Ça fout le tournis!», ajoute Heri Shinato.
«Ndrematoa, c’était le président de la République de la bande dessinée. Le monsieur tout tranquille que je voyais dessiner au stylo derrière son comptoir de concierge et n’a pas hésité à m’appeler pour que je jette un coup d’œil sur ses créations en avant-première qu’il recopiait encore sur des planches à livrer quand je passais par là. Ndrematoa a gagné le prix du public en me laissant à l’époque la deuxième place. A l’époque, qui étais-je pour prétendre la première place ? J’étais loin très loin de son niveau», conclut Sleeping pop.

Joachin Michaël

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