Bilan et avenir de la filière Litchi à Madagascar

Faisant parti des produits d’exportation de Madagascar, le litchi occupe une place considérable dans l’économie du pays. Mais comme toute autre filière, le litchi présente des enjeux que seuls les acteurs et ceux qui y sont impliqués sont aptes à cerner. En outre, la connaissance de ces enjeux se trouve inséparable de celle de l’historique de la filière.

L’introduction du litchi de Madagascar remonterait à 1764 et les premières exportations vers l’Europe ont débuté dans les années 1960. Initialement exportées fraîches par avion, les quantités commercialisées à cette époque étaient très faibles et, ce fruit n’apparaît sur les marchés européens que comme un produit de luxe réservé à une clientèle d’origine asiatique.

Malgré la faiblesse des quantités exportées, cette espèce fruitière fut rapidement intégrée dans les agrosystèmes de la côte-est du pays où on la retrouve de Taolagnaro (au Sud) à Antsiranana (au Nord). Le litchi est un produit agricole saisonnier.

En 1987, Madagascar a obtenu l’autorisation accordée par l’Union européenne (U.E) d’exporter des litchis traités à l’anhydride sulfureux, ce qui a considérablement modifié les enjeux de cette filière. Ce traitement post-récolte, garantissant une conservation des litchis pendant une durée de 4 semaines, a permis d’utiliser la voie maritime pour le transport des fruits et donc de diminuer très fortement le prix du litchi à l’importation.

Quelques années plus tard Madagascar est devenu le premier pays exportateur de litchi grâce à ce changement de moyen de transport et à une meilleure commercialisation des fruits sur les marchés européens. Cependant, le litchi malgache reste jusqu’à nos jours “un produit banal” au lieu d’être qualifié de “produit de luxe”. Force est de dire que le marché a subsisté contre vents et marées entre les exportateurs et les clients européens pour la plupart.

On peut dire que durant cette dernière décennie, une importante révolution au niveau de la filière s’est opérée, en l’occurrence au niveau du pays, désireux de faire valoir ses atouts. Mais face à cette révolution et au vu des risques parfois d’ampleur internationale qu’encourent les consommateurs, de nouvelles exigences sont aussi nées du côté des consommateurs. Ces derniers, qu’ils soient locaux ou internationaux veulent de plus en plus un gage de qualité de ce qu’ils consommeront.

Contexte actuel

Le litchi fait partie des produits agricoles qui placent Madagascar en bonne position sur le marché mondial et constitue ainsi une filière qui contribue considérablement à l’économie nationale. Face aux divers problèmes auxquels la filière doit actuellement faire face, tous les acteurs principaux de la filière, les producteurs, les collecteurs, les organismes d’appui, les exportateurs… fournir des efforts. L’Etat doit intervenir et jouer rôle de superviseur général, contrôler, valoriser l’exécution ou l’achèvement des efforts entrepris par les acteurs de la filière litchi.

Comment rehausser l’image de la filière afin d’en accroître la compétitivité de prix sur le plan international ?

La filière litchi, comme tout cycle de vie d’un produit est en phase de développement. Après la naissance de l’exportation de la filière vers les années 70, le marché a entamé sa phase de croissance vers la fin des années 80 par la mise au point des techniques de soufrage ; le nombre des exportateurs a augmenté avec l’arrivée des fournisseurs de l’hémisphère Nord sur le marché à tel point que le fruit tend à devenir un produit de grande consommation. Aussi, le marché européen peut-il s’en approvisionner toute l’année.

Ce qu’elle traverse actuellement est une la phase de transition permettant de pallier les différents problèmes que la filière a connus avant de passer à la phase de maturité, tout en maîtrisant les techniques appropriées. Ce marché en pleine mutation doit permettre à chaque fournisseur de mettre en place une politique concentrée et adaptée en trouvant des solutions dans l’immédiat.

Madagascar n’a pas été épargné par les problèmes qui surviennent à chaque campagne, malgré les efforts de réorganisation ; quant à la filière qui risque tôt ou tard de s’exploser pour ne laisser place qu’à des géants professionnels.

Par extrapolation, la commercialisation du litchi présente un bel avenir face à l’augmentation da la zone de chalandise et de la période de commercialisation qui pourrait s’étendre toute l’année, élargissant ainsi une échelle de la disponibilité. Mais cet avenir présente tout de même une instabilité pour le litchi de Madagascar à moins que le redressement de l’image de marque de ce fruit soit rétablit dans l’immédiat. La filière a besoin d’un assainissement et l’exécution a besoin de respect et de l’éthique.

Solutions

La priorité dans les actions à mener est qu’il est indispensable de redonner au litchi malgache une image de qualité en ce qui concerne le produit mais aussi les services liés au produit.
Dans la conjoncture actuelle, il est recommandé la mise en marche d’une structure adéquate en vue de pérenniser la filière litchi qui dépend de l’application d’une politique technique et commerciale telles que :

En premier lieu, il faudrait :
– Entreprendre des efforts de professionnalisation, à commencer par les acteurs de la filière
– Mettre en place une structure de sensibilisation et de communication
– Tester les résultats de la sensibilisation et de la communication, par diverses rencontres afin d’évaluer la perte des actions effectuées sur les principaux acteurs.
En second lieu, apporter une réorganisation très fiable des collecteurs et exportateurs. Enfin, la participation des organismes d’appui et l’intervention de l’état sont très primordiales pour l’assistance et l’aide nécessaire. Cela permettra de maîtriser les facteurs incontrôlables de la filière litchi qui se répètent chaque année.

Au niveau des producteurs

Les consommateurs se sentent actuellement trahis par les produits qu’ils consomment car les acteurs qui interviennent dans la filière ne se préoccupent pas de la régularité ni da la sécurité alimentaires, alors que la préservation de la santé des consommateurs est devenue en ce moment, la préoccupation majeur.

Les problèmes de dégradation de qualité sont liés au vieillissement de l’arbre de litchi, le manque de communication (communication unidirectionnel) entre les acteurs de la filière notamment les producteurs, le manque de professionnalisme ou de savoir-faire de la part des producteurs.

Une approche productrice à partir de l’objectif et de la vision sur la filière litchi pourrait déboucher sur des solutions. Il s’agit de :
– Développer la professionnalisation des producteurs se basant sur le changement de mentalité. Leur apprendre à investir et les aider à s’en sortir et réussir dans son milieu. “Pour bâtir l’avenir, il faut partir de ce que l’on possède”, dira-t-on
– Soutenir la pérennisation des actions venant des producteurs eux-mêmes et des autres acteurs ou organismes qui interviennent dans leur commune.
– Mise en place d’un collège des producteurs ou association des producteurs dont le but est le partage d’expériences.
– Consultation des organismes d’appuis à la production agricole pour l’assistance technique sur la production.
– Intervention des organismes d’appuis accessibles en milieux ruraux et engagement des agents vulgarisateurs ou techniciens formés par les formateurs qui circuleront dans les zones inaccessibles et enclavées.

Cette dernière recommandation doit tenir compte de la participation de l’Etat ou région à partir de leur dynamisme et de leur capacité à impliquer les autres, à savoir les organismes d’appuis et les exportateurs en partageant les responsabilités financières ou matérielles qui devraient s’y concentrer.

Dans cette approche, comme il y a des exportateurs ou des organismes d’appui qui interviennent directement dans le milieu rural, ils devraient considérer leur aspect social et leurs besoins quotidien en leur proposant de faire une autre culture ou activité pouvant leur procurer une autre source de revenus.

Au niveau des collecteurs

Les collecteurs sont les intermédiaires entre les producteurs et les exportateurs. On sait aussi que les collecteurs sont divisés en deux catégories, les professionnels et les “faux collecteurs”. Actuellement, les collecteurs constituent le maillon central de la démarche qualité dans la filière litchi mais ne sont pas assez professionnels. Pour cela, ils sont incités à se professionnaliser afin d’optimiser la compétitivité qualité de la filière. Ce qui signifie, par conséquent, un besoin en matière d’éducation et de formation à l’endroit de l’exploitation ; sans oublier un changement de mentalité ?

Pour un bon collecteur :
– La qualité traduit la valeur des produits (à la fois l’aspect et le goût) et prévaut sur la quantité. La considération de la qualité part de la production jusqu’à l’exportation en passant par la collecte. La qualité influe sur le prix et les besoins des consommateurs.
– La Norme : Pour le marché du litchi, la norme est le règlement à suivre ou les textes dictés par les institutions chargées de surveiller et respecter les exigences des consommateurs, transformateurs, et exportateurs. Autrement dit, pour les consommateurs, les produits achetés sur le marché sont exempts de maladies ou microbes ; pour les transformateurs et exportateurs, ils respectent les doses de produits chimiques s’il y en a et s’assurer sur le délai de transport ou de vente.

Au niveau des exportateurs

Les consommateurs sur le marché international se plaignent de la qualité du litchi arrivé à sa destination ou mise en vente dans les grandes distributions à cause de la qualité du litchi venant de notre pays. Les consommateurs adressent les reproches aux importateurs vendeurs, car il y a en quelque sorte mauvais choix de la part des fournisseurs.

Le principal problème du litchi malgache est la technique de conservation des fruits exportés. La maîtrise de cette technique est primordiale pour les exportateurs car l’acheminement des produits par voie maritime vers le marché international dure en moyenne 15 jours.

Etant donné la durée assez longue du transport, les produits nécessitent une conservation rigoureuse. Il faut donc respecter les conditions suivantes :
– Les normes exigées sur le marché international
– Les techniques de conservation exigées par le marché international
– Le respect des règlements sanitaires des denrées alimentaires
– La bonne conformité de la station de traitement

Le renforcement du rôle de l’Etat

L’Etat doit entreprendre un effort considérable dans le but d’assurer la pérennisation de la filière litchi. Il doit être actif et conscient de l’importance des transactions effectuées. Un des problèmes rencontrés réside dans l’enclavement de certaines zones de production. La priorité au désenclavement, par l’adoption de politique d’infrastructures routières, contribuera à promouvoir la filière. La réhabilitation des routes, pistes et ponts dans les diverses voies de desserte incite les exportateurs et les producteurs à opérer dans une concurrence loyale. La maximisation des entrepôts frigorifiques au quai de chargement portuaire est essentielle. A cela s’ajoute la sécurité au niveau des vergers et de l’investissement consenti par un opérateur.

Cette action doit s’appuyer sur la résolution des problèmes de la propriété foncière. Le chapitre foncier devra être pensé en vue de faciliter l’extension et l’incitation des opérateurs économiques pour une généralisation de la production. Il y va de la garantie de leur investissement et du revenu attendu de leur projet avec plus d’assurance et non sous la menace d’expropriation faute de documents légaux de propriété.

Andriatahina Rakotoarisoa

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