Le tonneau des Danaïdes

Chaque période de pluie est la période idéale pour tester la solidité et la qualité
de nos routes, notamment celles qui viennent d’être construites ou réhabilitées. On pourra ainsi apprécier si les travaux ont été effectués dans les normes ou non.
Après ces quelques jours de fortes pluies intermittentes, les ré­sultats ne se sont pas faits attendre. Les coupures de routes se multiplient pour diverses raisons (éboulements, affaissements). Ce ne sont pas seulement les routes nationales qui sont concernées.
Même celles se trouvant dans les zo­nes urbaines se trouvent dans un état la­mentable. Certaines routes nouvellement réhabilitées ont été complètement coupées en deux après ces fortes pluies de quelques jours. Pour quelles raisons, se demande-t-on ?
Tout d’abord, il faut reconnaître qu’il y a une part de responsabilité des usagers. Bien trop souvent, ces derniers ne respectent pas les directives relatives à l’utilisation des routes (dépassements des charges admises, non-respect des barrières de pluie…).
Effectivement, il existe bien des règles qui régissent le transport routier, mais les trans­porteurs n’en tiennent pas compte par intérêt. Du matériel roulant ne correspondant pas à
nos routes sont admises dans le pays et après on s’étonne que les routes soient mises à mal.
Si toutes ces infractions entraînent certainement une détérioration des routes plus vite que prévue, le fond du problème est ailleurs. Pour commencer, il faut entretenir ce qui existe déjà. Seulement, on remarquera l’insuffisance, voire l’absence d’entretien routier.
Pourtant, un fonds est spécialement dédié à ce sujet et qui est alimenté
à partir de chaque litre de carburant vendu sur tout le territoire national. L’utilisation de ce fonds reste une grande question. Et cela se re­marque jusqu’à l’absence de cantonniers.
La présence de cantonniers est vitale compte tenu de l’étendue du réseau routier national. De par leur proximité, ils sont les premiers à déceler les prémices de dé­gradation et intervenir avant que cela ne s’aggrave. Ils pourront ainsi apporter les premières réparations.
Mais le véritable fond du problème se situe au niveau de la réalisation des travaux qui ont été effectués hors des normes exigées. Bien sûr,
il existe un cahier des charges pour chaque projet routier d’envergure. Mais il se peut aussi que les termes du cahier des charges ne soient pas respectés.
Et par connivence, on effectue la réception provisoire des travaux sans qu’ils soient conformes aux réalisations exigées. Autrement dit, il existe une corruption de haut niveau. C’est le genre de pratique qui gangrène tout le pays et contre laquelle il faut lutter.
Chaque année, des milliards d’ariary sont investis dans les routes malgaches. Mais la si­tuation du réseau routier semble ne pas se dé­velopper et les routes s’améliorer. A vrai dire, c’est un gouffre sans fond et c’est pourquoi il est comparé à juste titre par certains de nos partenaires techniques et financiers au tonneau des Danaïdes.

Aimé Andrianina

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