Un goût plus qu’amer

La vie est belle du côté des paysans planteurs de cacao. En effet, actuellement, le kilo de fèves de cacao se vend entre 18.000 et 20.000 ariary à Ambanja – la capitale du cacao du pays -, soit une recette additionnelle de 3.000 à 4.000 ariary par kilo. Ce qui n’est pas rien pour ces paysans planteurs.
Toutefois, cette em­bellie des prix pourrait n’être que passagère. Compte tenu de ce ca­ractère conjoncturel de la situation, il y a des erreurs à ne pas commettre. La première est de ne pas faire monter les prix artificiellement. Vu la situation actuelle, on pourrait être tenté de faire beaucoup plus de bénéfice et faire grimper les prix.
Or, nous ne maîtrisons pas le mécanisme de fixation de prix à l’échelle mondiale. Pour cette raison, nous ne sommes pas en position de force pour imposer quoi que ce soit. De toutes les façons, tout dé­pend surtout de la de­mande internationale.
Certes, le cacao malgache est très bien coté sur le marché international, mais nos marges de manœuvre sont limitées car non seulement, nous ne sommes pas le plus grand producteur de cacao dans le monde – loin de là s’en faut -, nous ne sommes pas non plus le seul producteur de cacao fin.
Il ne faut pas oublier que cette embellie des prix serait due à des perspectives inquiétantes de la production mondiale qui font état d’un important déficit pour la campagne 2023-2O24. Les principaux pays producteurs africains font face à une baisse de la production à cause des aléas climatiques.
Par ailleurs, la mala­die qui dévaste des centaines de milliers d’hectares de plantations de cacao aggraverait ce défi­cit de la production mon­diale. Mais ce ne sera pas toujours le cas. Dans ces conditions, une fausse stratégie pourrait être fatale pour le cacao malgache.
On sait trop bien que certains acheteurs internationaux n’achètent que des fèves de cacao. Or, la meilleure démarche serait d’être capable de transformer sur place une partie de la production nationale. Ainsi, on créera sur place beaucoup plus de plus-value.
Mais ce n’est pas toujours possible. On se demande bien pourquoi on n’arrive pas à délocaliser la technologie de transformation dans les pays de production. C’est le sort de tous les producteurs de matières premières et qui sont obli­gés de les exporter en l’état.
Il faut savoir profiter de cette embellie des prix pour trouver toute une panoplie d’actions qui devraient permettre de pérenniser le prestige du cacao de Madagascar. Pour cela, il faudra améliorer ou tout au moins garder la qualité du cacao de Madagascar à son niveau actuel. Autrement, plus tard, il aura un goût plus qu’amer.

Aimé Andrianina

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