STCV : la valorisation de déchets à Madagascar, primée à l’international

Gaëlle Randriamanana-Pless vient d’être primée par l’Association Internationale des Maires Francophone (AIMF). L’entrepreneure recevra son prix lors d’un congrès qui se tiendra à Lausanne en Suisse du 22 au 24 mai prochain. Son entreprise STCV regorge de projets pour les années à venir. Rencontre

Vous venez d’être primée par l’Association Internationale des Maires Francophone (AIMF) comme étant la “femme francophone de l’année 2024”. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

C’est une grande reconnaissance, évidemment ! C’est un concours international dans les pays francophones. Je me suis portée candidate et la commune urbaine d’Antananarivo (CUA) a soutenu ma candidature.

En fait, ce prix fait suite à notre travail dans l’assainissement de la ville. Parce qu’on collabore depuis longtemps avec la commune urbaine d’Antananarivo. Dans le cadre de nos activités de collecte, de valorisation des déchets recyclables et la création d’activités génératrices de revenus pour les femmes, STCV est présente dans les fokontany.

Aujourd’hui, combien de femmes dans les fokontany collaborent avec vous ?

Avant, elles étaient à 1.500 avec le programme du FID, mais malheureusement le programme a pris fin. Nous avons amélioré notre système de collecte avec ces femmes. Toutes les opérations sont plus ciblées et régulières. Nous avons augmenté le prix de l’achat du kilo de plastique. Nous opérons dans quelques fokontany avec 10 femmes par fokontany. On essaie vraiment de les former et les fidéliser par rapport à ce travail de collecte.
STCV a activement participé à la dernière COP à Dubai. Qu’est-ce que cela a apporté à votre entreprise ?

J’ai représenté le secteur privé œuvrant dans la gestion de déchets. Le sommet nous a apporté beaucoup de connaissances (…). Le changement climatique est un thème récurrent et d’actualité, parce qu’on commence vraiment à ressentir les effets du réchauffement de la Terre. J’ai pu voir également les initiatives qui se font à l’étranger, notamment dans les pays développés. Ils font vraiment beaucoup de choses dans tout ce qui est économie circulaire et valorisation de déchets. Cela a été une COP où la gestion des déchets a pris une grande place, un domaine très important pour lutter contre les changements climatiques. Le rendez-vous a permis une grande visibilité pour STCV. J’ai pu rencontrer beaucoup de gens dans le domaine et échanger des pratiques.

Durant cette COP, vous avez aussi signé une convention de partenariat avec le MEAH. Sur quoi cette collaboration porte-t-elle ?

Lors de cette COP, nous avons effectivement a eu l’occasion de signer une convention avec le ministère de l’Eau et Assainissement et Hygiène (MEAH). Il s’agit d’une collaboration globale parce que le ministère mène plusieurs projets dans le domaine de l’assainissement. STCV se positionne en tant que secteur privé avec une vision holistique par rapport à notre expertise à la gestion des déchets recyclables.
Nous allons également collaborer avec la JICA, la CUA, le MEAH et le MEDD sur la gestion de déchets au niveau d’un quartier pilote qui se trouve à Ampefiloha, dans lequel les déchets, essentiellement, du plastique seront collectés par STCV.

Quelle quantité de déchets collectez-vous ? Et où les déchets revalorisés vont-ils ?
Chaque semaine, tout déchet confondu, on est à 10 tonnes. 60% des déchets sont du plastique.

Nous développons une économie circulaire parce que nous participons à la création de nouveaux objets avec ces déchets. Et ces produits finis sont destinés au marché local. C’est la valeur ajoutée que nous apportons au Vita malagasy, mais surtout notre contribution à la baisse d’émission de gaz à effet de serre. En effet, au lieu d’importer de la matière première sur un bateau qui consomme beaucoup d’énergie et d’émission de gaz à effet de serre, nous fournissons la matière première.

Et on a commencé notre propre valorisation : c’est le charbon écologique qui provient des déchets. Ce produit est essentiellement destiné pour le moment aux zones franches. Donc, aux usines de textiles qui ont des chaudières à bois, pour remplacer le bois de chauffe, et éviter de couper les arbres.

Dans cette quête de valorisation : qu’est-ce qui pose problème en ce moment pour une entreprise comme STCV ?

Un peu de tout ! Nous collaborons avec des artisans locaux pour mettre en valeur leur savoir-faire pour construire des machines. Malheureusement, il y a des limites. Donc, nous devons importer des machines. A l’heure actuelle, nos activités commencent vraiment à s’industrialiser et nous avons donc besoin de plus grosses machines.

STCV est implantée à Antananarivo. Est-il est envisageable que le modèle soit éparpillé dans toute l’île ?
Effectivement, on envisage cette année d’aller dans plusieurs villes de Madagascar pour commencer un nouveau programme RSE. Nosy Be est une ville très touristique, et on a besoin d’une vitrine durable pour Madagascar. Et sur la côte Est, parce qu’il y a beaucoup d’usines dans cette zone qui ont besoin de valoriser leurs déchets.

D’après votre constat, les entreprises collaborent-elles avec vous par tendance ou par conviction ?

Les entreprises sont de plus en plus responsables et sensibilisées à propos de leurs impacts sur l’environnement. Nous leur apportons donc une réponse par la gestion de leurs déchets et leur fournissons aussi un programme RSE complet avec des formations, ainsi qu’un certificat de traçabilité prouvant la revalorisation.

Tiana Ramanoelina

Gaëlle Randriamanana préside le groupement des acteurs de déchets et alternatives écologiques de Madagascar (GADAEM). En collaboration avec le ministère de l’environnement et du développement durable (MEDD), ce groupement a été lancé officiellement le 30 mars dernier, lors de la journée du zéro déchet.

“Le but est de regrouper tous les acteurs privés de gestion des déchets et des alternatives écologiques. Nous nous sommes rassemblés pour pouvoir coordonner nos actions dans l’assainissement, l’hygiène et le développement durable. En effet, la pollution de l’air et des eaux est en grande partie engendrée par le non traitement des déchets, dont les plastiques. Nous sommes aussi là pour informer et former tant en interne qu’externe, des normes, des actions, des politiques à mettre en place”.

La fondatrice de STCV participera également à la 4ème édition de la “Rencontre des Entrepreneurs Francophones” se tiendra du 29 mai au 1er juin à Marrakech notamment pour visiter la première ville verte d’Afrique.

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