Mercredi des idées en goguette: les vertus de la décence

400. C’est le nombre des zébus qui auraient été tués en une journée récemment dans une localité du Nord-ouest. C‘était à l’occasion d’une fête destinée à remercier la popu­lation locale par la gagnante des dernières élections législatives. En effet, les chiffres provisoires publiés par la Ceni viennent d’accorder une large victoire à la candidate. Compte tenu de l’importance du « valimbabena » ou « gratitude » en faveur de la population locale, il était tout à fait légitime qu’elle renvoie l’ascenseur d’abord en célébrant la victoire par le biais d’un rassemblement festif, et ensuite, par d’autres moyens correspondant à ses responsabilités à venir, c’est-à-dire être porte-parole de la population locale, ou comme on dit en malgache « solombavambahoaka ». Jusque-là donc, rien de mal. D’autant plus que le zébu a un caractère sacré non seulement sur le plan culturel mais également au niveau socioéconomique pour les compatriotes.

Là où le bât blesse, c’est que le nombre de zébus qu’une personne possède représente un signe extérieur de ri­chesse important. Cepen­dant, dans le contexte actuel, faire exécuter quatre cent zébus en une seule journée relève ni plus ni moins que de l’indécence. Car, ce n’est un secret pour personne, de nombreux compatriotes peinent à trouver de quoi se nourrir et certains sont obligés de trimer à n’importe quelle heure pour pouvoir vivre comme tout autre être humain. Celui qui a trouvé cette idée dispose d’ailleurs d’une imagination plus que dé­bordante. Ce n’est pas non plus très approprié de la part d’un élu censé transmettre les valeurs de la décence et de la probité. A moins que ce soit voulu pour faire du buzz mais là encore, ce n’était pas gagné.

Le pire c’est que, dans cette histoire, mê­me s’il se pourrait que le nombre ait été rallongé, la personne concernée n’a pas jugé bon de l’infirmer. Au contraire, elle l’a consolidé lors d’une conversation privée. Et si la polémique s’arrête à ce niveau, c’est tant mieux. Sauf qu’en pareil­le circonstance, le hic c’est que c’est sa famille politique qui en subit les conséquences, comme dommage collatéral.

A l’époque de l’ancien président Didier Ratsiraka, même ses détracteurs disaient que certains ordres qui vont à l’encontre des intérêts publics au niveau des localités reculées ne venaient pas de lui, mais que c’était lui qui subissait les mauvaises décisions et pratiques faites par les personnes qu’il nommait. Et il en était de même pour tous les responsables étati­ques qui se sont succédé. Les citoyens peuvent associer les comportements d’une personne à sa famille politique et par ricochet, affectant la popularité et la crédibilité de cette dernière.

Autant de raisons qui devraient donc ramener certaines personnalités, élues ou nommées, à faire preuve de pudeur et d’exemplarité dans leur comportement vis-à-vis de leurs compatriotes, dont la majorité reste, certes, silencieuse mais loin d’être aveugle.

Rakoto

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