Rentrée scolaire : les parents et le personnel éducatif sous pression

La rentrée scolaire a été un vrai parcours du combattant pour de nombreux parents. Chaque année, la préparation des fournitures scolaires est une épreuve, mais cette fois-ci, elle semble devenue insurmontable pour beaucoup. Des enfants se sont présentés à l’école sans fournitures scolaires, et certains établissements ont signalé des retards d’inscriptions. A croire que les aides de l’Etat pour alléger les charges parentales ne suffisent pas pour apaiser la situation, selon les témoignages de certains parents et responsables d’écoles.

Le lundi 9 septembre, les enfants de Narindra Raveloarisoa se sont rendus à l’école avec des fournitures incomplètes. D’habitude, cette mère de trois enfants commence à préparer les fournitures un mois avant la rentrée, mais cette année, elle se trouve en grande difficulté. “J’ai pu acheter des fournitures pour les deux plus jeunes, mais l’aîné devra encore attendre. Cette année a été particulièrement difficile en raison de la hausse des prix des fournitures scolaires”, témoigne-t-elle. Sur le marché, les prix affichés sont vertigineux. Un paquet de cinq cahiers de 200 pages grand format coûte entre 30.000 et 35.000 ariary, tandis qu’un paquet de dix cahiers de 100 pages grand format coûte entre 22.500 et 25.000 ariary. Les cartables de qualité se vendent entre 50.000 et 70.000 ariary, mais les parents peuvent en trouver pour environ 10.000 ariary chez les vendeurs ambulants, bien que ceux-ci soient de mauvaise qualité. Les dépenses pour un élève peuvent facilement s’élever à environ 120.000 ariary. Toutefois, lorsque les parents ont plusieurs enfants, voire deux, trois ou quatre, la situation devient difficilement gérable.

De plus, certaines écoles exigent des fournitures spécifiques de haute qualité, ce qui complique encore davantage la tâche pour les parents. “Pour les pinceaux et les boîtes de peinture, par exemple, on impose souvent une marque de qualité, car l’année scolaire est longue et on ne veut pas que l’élève se retrouve sans pinceaux à la moitié de l’année”, témoigne une directrice d’école. Bien que les prix soient supportables pour certains, ils deviennent un véritable casse-tête pour les parents ayant deux, trois ou quatre enfants. Ces parents choisissent souvent de répartir les dépenses et de faire attendre certains de leurs enfants. “Ce n’est pas grave, car la première semaine est consacrée à des activités d’immersion, donc nous n’utilisons pas encore vraiment les cahiers et les stylos”, explique une enseignante.

Mais ce n’est pas tout : l’épreuve des fournitures scolaires n’est qu’une partie du problème, les parents doivent également payer les frais d’inscription. Dans les écoles privées, ces frais peuvent atteindre un minimum de 30.000 ariary, ce qui est loin d’être facile pour les familles nombreuses. A cela s’ajoutent les cotisations parentales, la cantine scolaire, et les frais de scolarité mensuelle et bien d’autres dépenses comme l’achat obligatoire d’uniformes ou de tee-shirts auprès des établissements. En conséquence, de nombreux parents désertent les écoles privées pour inscrire leurs enfants dans des écoles publiques, où les frais d’inscription sont censés être gratuits. “La plupart des enfants qui ont passé le CEPE sixième ne sont pas revenus, et j’ai tout de suite deviné qu’ils avaient migré vers des écoles publiques. Ce que je trouve dommage, c’est que la qualité de l’enseignement acquise dans les écoles privées risque d’être perdue. Dans le public, avec le nombre élevé d’élèves par classe, le suivi est plus difficile”, regrette une directrice d’école. Dans les établissements publics, la situation est également stressante pour gérer le nombre croissant d’inscriptions. “Nous avons dû refuser des inscriptions. Nous avons même essayé de rajouter des bancs pour dépasser notre capacité d’accueil, mais à un moment donné, nous ne pouvons plus recevoir d’élèves”, témoigne une enseignante dans une école publique de la capitale.

D’ailleurs, les promesses de l’État d’alléger les charges parentales ne satisfont pas non plus les établissements publics. Les frais d’inscription s’élevaient auparavant à 97.000 ariary par an par enfant, soit 9.000 ariary par mois. Cette fois-ci, selon l’annonce du ministère de l’Éducation nationale concernant la gratuité des inscriptions, les établissements publics ne peuvent plus demander aux parents que de payer le salaire des enseignants Fram. “C’est une bonne solution, mais il faut aussi que l’Etat subventionne au maximum les écoles pour leur permettre de fonctionner. Même avec les 97.000 ariary par élève par an, nous avions du mal à fonctionner, et maintenant, nous sommes dans l’incertitude. Nous croyons en la bonne volonté de l’Etat, mais il faut trouver une solution qui permette aux deux parties de s’en sortir indemnes”, déclare une responsable.

Néanmoins, dans des situations pareilles, la solidarité est essentielle. Dans les églises, des appels aux dons sont lancés pour aider les parents en difficulté, encourageant ceux qui ont plus à donner à ceux qui ont moins. Dans les écoles, le personnel éducatif trouve des moyens de soutenir les parents, notamment en organisant la première semaine de rentrée scolaire avec des activités d’immersion plutôt que des cours, permettant ainsi aux parents de compléter les fournitures scolaires. Ils acceptent également que certains élèves ne soient pas encore prêts et sont à l’écoute des parents.

Cependant, les défis augmentent pour les écoles privées, qui voient leurs bancs se vider. “Il n’est pas question pour nous que des enfants redoublent une année scolaire, et pour cela, nous allons devoir faire tous les efforts possibles pour que tous soient au niveau, quitte à travailler plus intensément. Les parents ne veulent pas que leurs enfants redoublent une année à cause du coût de la vie et de la scolarité. C’est l’un de nos plus grands défis, mais en même temps, nous avons la responsabilité de fournir une éducation de qualité. Nous voulons que ces enfants soient le futur du pays, et c’est une mission que nous avons décidé de mener à bien jusqu’au bout, dans le corps enseignant”, témoigne une directrice d’école.

Nambinina Jaozara

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