Portrait : quand Codal ambitionne de mettre tout Madagascar en conserve

La conserve, cette vieille tradition de grand-mère, lorsqu’elle devient industrielle, peut nourrir l’économie. C’est le cas de Codal, qui ambitionne de “mettre tout Madagascar en conserve”.

Des jus de fruits aux confitures, en passant par le célèbre ravitoto, star de la cuisine traditionnelle malgache, ainsi que le koba et le romazava, tout est désormais disponible en conserve. Ces produits sont accessibles à l’étranger, permettant à la diaspora de retrouver des morceaux de la Grande île à des milliers de kilomètres. Cela fait plusieurs décennies que Codal s’est lancé dans cette activité et se dévoue au service du secteur alimentaire malgache.

L’histoire de Codal débute en 1932, lorsque Jacques Brunot, ingénieur des Arts et Métiers, arrive à Antsiranana pour travailler dans l’industrie de la viande. À l’époque, le corned beef de zébu malgache est sélectionné pour faire partie des rations militaires des soldats pendant la guerre. Après le conflit, Jacques Brunot est muté à Antananarivo, où il décide de quitter la société de produit alimentaire Rochefortaise et de lancer sa propre affaire. En 1949, il rejoint une société nommée Comptoir d’Alimentation, qui donnera naissance à l’acronyme Codal. Au fil des années, la gamme de produits de la société s’enrichit, passant du poivre vert aux achards, des jus de fruits et fruits aux sirops, sans oublier le sakay. Plus récemment, Codal a introduit des conserves de ravitoto, romazava, et koba, des innovations qui ont rencontré un grand succès auprès de la diaspora malgache.

“Cela a commencé avec la suggestion de certains clients. Au début, mon père et la responsable production se sont lancés sans trop y croire, mais le succès fut immédiat. Après réflexion, il y a bien du cassoulet en boîte en France, pourquoi pas du romazava ! Les ventes sont cependant bien plus importantes à l’export. Pour les Malgaches expatriés, c’est un morceau de Madagascar, cela a une dimension émotionnelle, car le produit vient de leur pays. Ouvrir une boîte de romazava à plus de 10.000 kilomètres de chez soi n’est pas anodin. Aujourd’hui, nous sommes fiers de pouvoir apporter cela aux Malgaches installés à l’extérieur. Sur le marché local, l’argument est surtout la facilité de préparation et le fait que ce soit un produit local. Les consommateurs ont fait un bon accueil à ces produits”, explique Olivier Brunot, directeur adjoint de Codal et représentant de la troisième génération de la famille dans la société.

Selon Olivier Brunot, les produits phares sur le marché local sont l’achard de légumes en boîte de 125g et les sakay rouge et vert en bocal de 100g, qui se vendent presque à égalité. Parmi les conserves salées, le ravitoto se distingue comme l’un des produits les plus populaires, surpassant même le romazava. En ce qui concerne les confitures, celle à la fraise se vend le mieux. A l’exportation, les produits typiques de Madagascar, tels que les brèdes et les sakay sont les plus prisés. Codal produit plus de 200.000 conserves alimentaires par an, réparties entre le marché local et international, avec la France comme principal débouché, en grande partie grâce à la diaspora malgache. Sur la Grande île, elle compte plus de 280 clients dans son portefeuille. La société exporte également vers la Suisse, le Danemark et l’Espagne, notamment du poivre vert, un produit qui jouit d’une renommée internationale. “Nous avons été les pionniers du poivre vert en saumure depuis 1964. Le poivre vert de Madagascar est très parfumé et est reconnu comme le meilleur. Globalement, nous avons encore des opportunités à l’export, surtout vers l’Europe”, explique-t-il.

Les conserves de Codal sont vendues à un distributeur qui les revend ensuite dans des boutiques dites ethniques (africaines, asiatiques, maghrébines). Les saveurs de ces produits restent fidèles à la cuisine traditionnelle malgache, ce qui les rend populaires. Les ventes du marché malgache atteignent leur pic pendant les périodes où les Malgaches de la diaspora rentrent du pays, comme à Noël ou durant les mois de juillet et août. “Notre importateur organise également des promotions autour du 26 juin et doit toujours maintenir des stocks importants, ce qui montre que la majorité de notre clientèle est composée de Malgaches”, relate Olivier Brunot. Il note également que la concurrence provient davantage des pays africains que des produits français, comme le saka saka, équivalent du ravitoto, ou les purées de piment africaines, antillaises ou asiatiques. Bien que les produits de Codal soient souvent plus chers que ceux d’origine africaine, la société fait confiance aux Malgaches pour préférer un produit de leur pays. “Le sakay malgache n’est pas comparable aux purées de piment africaines”, témoigne le directeur adjoint.

Codal ambitionne de prouver que l’alimentaire malgache peut atteindre un niveau haut de gamme. Pour cela, l’entreprise applique des cahiers des charges strictes concernant la sélection des matières premières, les processus internes, la traçabilité, et l’équité. Tous ses produits sont sans conservateurs, avec une durée de validité de 3 à 4 ans. Selon le type de produit, ils sont soit pasteurisés, soit stérilisés après avoir été mis en conserve. Pour vérifier qu’un produit n’a jamais été ouvert, les consommateurs peuvent examiner l’état du sceau de sécurité qui lie le bocal à son couvercle, ou se fier au “pop” des capsules flip lors de l’ouverture, indiquant que le produit est encore bon. Il est également conseillé de conserver les produits au réfrigérateur après ouverture, en particulier pour ceux contenant peu de sucre, comme les nouvelles crèmes à tartiner.

En outre, Codal ne se contente pas de servir les consommateurs locaux et la diaspora ; la société collabore avec de nombreux paysans agriculteurs malgaches, notamment dans les régions d’Antsirabe et de Toamasina, et figure parmi les principaux fournisseurs d’emplois à Madagascar. Certains de ces partenaires travaillent avec la société depuis 10 voire 20 ans. “Lorsque nous avons commencé à faire des produits Bio, Codal a financé intégralement l’agrémentation de leurs parcelles et les a assistés dans la mise en place des méthodes nécessaires au cahier des charges”, relate Olivier Brunot.

Nambinina Jaozara

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