Le Grand Sud est incontestablement une pépinière d’artistes. Parmi eux, le groupe Tiahy veut porter haut la diversité culturelle de son pays, au-delà des frontières. Attendu sur la scène de No Comment Bar Isoraka ce jeudi et au festival Sica (Gabon) en novembre, Jean-Prosper Nambinindrazana, le meneur du groupe, nous partage son parcours, ses inspirations et son expérience.
* Les Nouvelles : Pour commencer, parlez-nous de votre parcours ?
– Jean-Prosper : Issu d’une lignée de musiciens, notamment du côté paternel, j’ai voué une passion grandissante pour la musique depuis ma prime jeunesse. C’est dans les «sekoly alahady» et chorale de mon village, à Ambondro, dans la région Androy que j’ai commencé à parfaire ma technique vocale. Dans cette contrée de l’île, nos paysans plantent du sorgo à la place du riz, en raison des conditions climatiques. La nouvelle récolte est accueillie avec de grandes fêtes populaires, durant le festival sorgo,
c’était en 2005. A ce propos, j’ai écrit des paroles que j’ai proposées par la suite au comité d’organisation. A ma grande surprise, l’on m’a emmené à Ambovombe pour une séance d’enregistrement. En 2010, je me suis lancé dans les cabarets à Toliara et à Antananarivo, au cours desquels j’ai pu tisser un vaste réseau d’artistes et côtoyer des grands noms comme les piliers du groupe de Malagasy Orkestra, Vaovy, Salala et bien d’autres encore.
* Et puis il y a eu le groupe Tiahy
– Avec la ferme ambition de perpétuer l’héritage culturel de l’Androy, Tiahy a vu le jour en 2020. Composé de Chrysantho Zama à la guitare et au chant, Mario Gizavo à la guitare basse, Deshman à la batterie et moi-même en tant que lead vocal, danseur, accessoiriste, le quartet puise son art dans l’Afro ngoloy, un savant mélange de danse traditionnelle, de chant et de musique moderne. Avec une dizaine de titres déjà enregistrés, nous sommes actuellement en pleine préparation de notre premier album. Je mets en musique mon propre vécu mais également et surtout la réalité de l’Androy en matière de changement climatique, de malnutrition, d’insécurité et de diversité culturelle. Ce sont les combats de mes prédécesseurs auxquels j’aimerais bien continuer.
* Quelle place la musique occupe-t-elle dans la culture antandroy?
– La musique est omniprésente dans notre quotidien. Chaque foyer a au moyen un instrument, donc forcément des musiciens. Il y a ceux qui parviennent à réaliser leur rêve et devenir des artistes professionnels et d’autres pas. De mon côté, j’ai toujours voulu devenir artiste. Quand on me confie la garde des zébus et des chèvres, je viens toujours accompagné d’une mandoline de facture artisanale. Je jouais pour me faire plaisir tout en imaginant le champ de manioc comme mes spectateurs. Mon premier instrument professionnel était une guitare acoustique offerte par mon père en 2009.
* Vous êtes sélectionnés dans le cadre du Festival Sica ?
– Effectivement. C’est un immense honneur de pouvoir représenter le pays à cet évènement d’envergure continentale. La 18e édition du festival Sica se déroulera du 4 au 10 novembre à Libreville (Gabon), autour du thème «L’impact éducatif de l’artiste au sein de la société». En plus de la participation scénique, Tiahy est également en lice dans la catégorie «musique moderne d’inspiration traditionnelle», dont le vote public est actuellement ouvert. Il faut souligner que chaque pays participant prendra en charge le billet d’avion aller-retour et le comité d’organisation s’occupera de l’hébergement. Dans ce contexte, nous lançons un appel à financement à l’endroit des généreux donateurs pour que nous puissions faire honneur à notre pays.
Recueillis par
Joachin Michaël