Comme il fallait s’y attendre et comme nous l’avons déjà prédit dans cette chronique, l’aide américaine au développement traverse actuellement une période d’incertitude. Et pour cause : le milliardaire Elon Musk, mandaté par Donald Trump pour réduire les dépenses fédérales, penche pour la fermeture imminente de l’USAID, l’Agence des États-Unis pour le développement international. Une suppression justifiée par des raisons budgétaires.
Pour le moment, la dissolution définitive de cette entité n’est pas encore officielle puisqu’il s’agit d’un gel, mais tout porte à croire que l’agence tend à disparaître ou, dans une moindre mesure, verra ses interventions diminuer dans les jours à venir. Quoi qu’il en soit, les employés de cette agence ont reçu l’ordre de ne pas se rendre au travail dès le début de la semaine. L’USAID, qui gère des programmes dans 120 pays, est paralysée.
Il faut savoir que des milliers d’organisations, notamment en Afrique, sont touchées par ce changement, en particulier celles travaillant dans les domaines de la santé, de l’éducation, des droits des femmes, de la lutte contre le paludisme et de la planification familiale. Pour comprendre l’ampleur de l’intervention de l’USAID dans le pays, il suffit de jeter un coup d’œil à son site web. À titre d’illustration, il y est indiqué que près de 1,2 million de personnes ont été protégées du paludisme grâce à la pulvérisation d’insecticides dans les foyers en 2020, 464;195 enfants de moins de 5 ans ont bénéficié de soins nutritionnels essentiels la même année, 10 des 35 centres de santé ruraux ont déjà été électrifiés et 140;000 personnes auront accès à
de meilleurs soins.
Concrètement, une militante des droits humains n’a pas pu retenir son dépit, hier. «Avec l’African Climate Justice Movement (ACJM), dont je fais partie, nous accompagnions et financions une quarantaine de petites associations féministes à travers l’Afrique avec l’appui de l’USAID. Des femmes qui se battent contre les violences, contre l’injustice, contre les ravages du climat ou les projets destructeurs de ressources naturelles. Aujourd’ hui, on leur coupe l’herbe sous le pied. À Madagascar, une association dont je fais partie, qui lutte contre les discriminations, subit la même claque. Des financements qui permettaient d’aider les plus vulnérables, de créer des opportunités, de faire avancer les droits… Tout ça balayé en un claquement de doigts, sans aucune considération pour les vies qu’on sacrifie.»
Au-delà des chiffres et des témoignages, cette décision soulève une question plus large sur l’avenir de l’aide internationale dans les pays en développement car les conséquences risquent d’être particulièrement graves. L’USAID a toujours été un acteur clé dans plusieurs secteurs vitaux du pays. La suppression de ses programmes pourrait aggraver la vulnérabilité des populations les plus précaires, en particulier dans les zones rurales. Par ailleurs, des projets en cours, comme l’amélioration de l’accès à l’eau potable et le soutien aux agriculteurs, sont menacés. Sans alternative rapide, cette situation pourrait freiner les efforts de développement et accentuer la dépendance du pays à d’autres bailleurs de fonds, tout en mettant en péril des avancées durement acquises ces dernières années.
Rakoto