Carburant: ajustements et conséquences

Depuis le début de l’année, les prix du carburant à Madagascar ont connu des ajustements. Certains ont prédit une hausse inévitable. A la surprise générale, il y a eu des baisses.

Le mécanisme d’ajustement automatique des prix consiste à réviser mensuellement le prix du carburant. Cet ajustement à la baisse ou à la hausse est plafonné à 200 ariary par litre. L’objectif étant de réviser le prix à la pompe en fonction de la fluctuation du marché international.

Ce nouveau mécanisme est l’une des conditionnalités du FMI dans le cadre de deux nouveaux programmes d’aide budgétaire, en l’occurrence la Facilité élargie de crédit (FEC) et la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD).

“Ce mécanisme est susceptible d’avoir des effets positifs sur l’économie. Une réduction du coût du carburant peut entraîner une baisse des tarifs de transport, ce qui pourrait se traduire par une diminution des coûts de distribution des produits de première nécessité. Cependant, l’ampleur de cette influence dépend de la répercussion effective de cette baisse par les transporteurs et les distributeurs sur les prix finaux des biens”, explique Andriatahina Rakotoarisoa, économiste. “Cela peut également améliorer le pouvoir d’achat des ménages, notamment en réduisant les dépenses liées aux transports et, potentiellement, en abaissant le coût des produits de première nécessité. Toutefois, l’impact réel sur le pouvoir d’achat dépend également de la transmission de cette baisse aux consommateurs finaux et de la proportion des dépenses des ménages consacrés aux produits affectés par le coût du carburant”, poursuit-il.

Prix gelés depuis deux ans

Cela fait plus de deux ans que les prix du carburant sont gelés à Madagascar. Auparavant, les prix affichés à la pompe étaient calculés tous les six mois. La dernière hausse est intervenue en 2022, étant donné que c’est l’Etat qui compense la différence. En 2020, le prix du baril a chuté sur le marché international mais les prix à la pompe à Madagascar n’ont pas changé, les pétroliers ont pu tirer profit de cette situation.

“Entre janvier 2019 et septembre 2022, 72% des volumes de gasoil écoulés à Madagascar ont été commercialisés à des prix inférieurs à la vérité des prix. Cet écart, appliqué aux prix à la pompe afin de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs, est à l’origine du solde négatif du lissage des prix, communément désigné sous le terme de passif”, explique une source proche du dossier.

Dans le même temps, Madagascar s’est engagé auprès du FMI à ce que le passif de l’Etat envers les pétroliers ne dépasse pas les 300 milliards d’ariary. “Le montant total de ce passif en mai 2022 était estimé entre 237 et 347 milliards d’ariary”, chiffre notre confrère, le Journal des Archipels. Quoi qu’il en soit, en début d’année, le ministre de l’Energie et des hydrocarbures avait déclaré à la presse n’y avait plus de passif de l’Etat envers les pétroliers, tandis que ces derniers avaient aussi réglé leurs dettes envers l’État.

Par ailleurs, une trentaine de paramètres détermine les prix affichés à la pompe. “On citera notamment le prix Platz, les coûts de transport, le taux de change, les divers frais comme la douane, le dépôt, les marges des grossistes, c’est-à-dire les pétroliers et les marges des détaillants entre autres. La plupart de ces paramètres comme le prix Platz et le taux de change sont variables. Ce n’est pas le cas du prix du transport qui change tous les ans car l’Etat malagasy peut négocier”, explique un expert en énergie.
“Les secteurs les plus susceptibles de bénéficier de la baisse des prix du carburant incluent le transport, la logistique et l’agriculture en raison de la réduction des coûts opérationnels. Les consommateurs pourraient également en profiter si les économies réalisées sont répercutées sur les prix des biens et services. À l’inverse, les secteurs liés à la production ou à la distribution de carburant pourraient voir leur marge diminuer en raison de la baisse des prix”, expose l’économiste. Avec la mise en place du mécanisme d’ajustement automatique, les prix du carburant à Madagascar sont désormais susceptibles de varier en fonction de fluctuations des cours internationaux et du taux de change de l’ariary. Cela étant, “Bien que la première application de ce mécanisme ait conduit à une baisse des prix, il est possible que des hausses surviennent à l’avenir si les conditions du marché international le dictent”, avertit-il. Le gouvernement a toutefois fixé une variation mensuelle maximale de plus ou moins 200 ariary par litre pour atténuer les impacts sur les consommateurs.

Tiana Ramanoelina

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