L’appui à la jeunesse ne relève pas d’un simple choix, mais d’un véritable devoir. Emmanuel Macron et Andry Rajoelina l’ont affirmé avec force lors de leur rencontre avec les Young Leaders de la French-African Foundation, ce mercredi 23 avril. Plus de 250 jeunes entrepreneurs venus de tout le continent africain – notamment de Madagascar, du Sénégal, de la Zambie, du Mali, du Niger ou encore du Maroc – ont pris part à cet échange inédit. Un moment fort durant lequel les deux chefs d’État ont répondu aux questions posées par les jeunes leaders, représentés par leurs ambassadeurs, et ont partagé leurs conseils et retours d’expérience personnels. Les Aperçu des propos marquants tenus lors de cet événement.
“S’engager, c’est être porté par quelque chose de plus grand que soi” – Emmanuel Macron
Ce qui permet de mener des combats, c’est d’être animé par une cause qui nous dépasse. Malgré nos différences – nos histoires, nos pays – l’engagement, qu’il soit politique, associatif ou collectif, puise sa force dans cette élévation. Dans un monde où l’individualisme domine et où l’engagement politique est souvent décrié, il est essentiel de rappeler que s’investir pour la vie de la cité est une démarche noble. Il faut des femmes et des hommes pour en prendre soin. C’est même, à mes yeux, l’une des choses les plus importantes. À la jeunesse ici présente, je veux dire ceci : engagez-vous. L’engagement est un supplément d’âme, une source de sens qu’on ne trouve nulle part ailleurs. On accomplit de grandes choses quand on est animé par cette énergie, par cet enthousiasme – au sens étymologique du terme, ce “petit dieu en soi” qui nous pousse plus loin, plus haut. Ce qui nous a permis d’accéder aux fonctions que nous occupons aujourd’hui, c’est précisément cet enthousiasme et cet attachement profond à notre pays, à notre patrie – quelque chose de plus grand que nous-mêmes. Il ne faut jamais perdre cela.
Mais s’engager, c’est aussi accepter de prendre des risques. Parfois on réussit, parfois on échoue. C’est un message important à adresser à la jeunesse : le succès est marginal dans toute aventure. Beaucoup de responsables politiques, d’entrepreneurs, de dirigeants ont connu de nombreux échecs. Mais ils se sont relevés plus souvent qu’ils ne sont tombés. Et c’est cela qui fait toute la différence. La pire des choses serait de ne pas oser. Notre message est donc un message d’audace : prenez des risques. L’échec fait partie du chemin. L’essentiel est d’en tirer des leçons pour mieux rebondir.
“L’amour de la patrie doit guider chacun de nos actes” – Andry Rajoelina
Pour ma part, c’est l’amour de la patrie qui m’anime. Chaque jeune a le choix, mais aussi le devoir : celui d’agir plutôt que de subir. Je suis convaincu que chaque citoyen a un rôle à jouer au sein de sa communauté, pour contribuer au changement. On ne peut pas réussir dans la vie sans projet, et sans la volonté de se donner les moyens d’y parvenir. Je me suis lancé en politique très jeune. À 33 ans, j’ai été candidat à la mairie d’Antananarivo. Ce fut une période difficile, car j’étais un nouveau venu dans ce monde. Beaucoup m’ont découragé. Pourtant, ce sont souvent ceux qui découragent qui, eux-mêmes, n’ont pas réussi. Mon état d’esprit a été différent : je me suis dit “je vais y arriver”. Et c’est ce que je voudrais dire aujourd’hui aux jeunes : Ne vous laissez pas freiner par ceux qui n’y croient pas. Quand on vous dit que les problèmes sont trop nombreux, que le succès est impossible, répondez que vous allez réussir. Et donnez-vous rendez-vous… le jour où vous aurez réussi. Les défis sont encore nombreux, mais c’est à chacun de les relever avec courage. Et puis, souvenez-vous : le plus important, ce n’est pas le titre. Que vous soyez président, premier ministre ou sénateur, un jour, vous serez un “ex” : un ex-président, un ex-sénateur. Ce qui comptera vraiment, c’est ce que vous avez accompli, ce que vous aurez laissé dans l’histoire.
“Le secteur privé est un moteur essentiel du développement en Afrique” – Emmanuel Macron
Le secteur privé joue un rôle fondamental dans le développement du continent africain et dans le renforcement de nos partenariats. Ces dernières années, la France a beaucoup investi, notamment à travers l’investissement solidaire, l’action de l’Agence Française de Développement (AFD), et diverses coopérations bilatérales. Mais au-delà de ces investissements publics, la première forme de solidarité entre la France et l’Afrique provient des diasporas. Leurs transferts financiers et initiatives privées constituent une richesse inestimable, et cela vaut également pour d’autres pays européens. Cette solidarité privée, ancrée dans les liens humains, culturels et économiques, a un impact concret sur les territoires.
Cependant, cela ne suffit pas. Le principal défi auquel le continent africain est confronté peut se résumer en deux mots : formations et capitaux. L’Afrique dispose d’un formidable atout démographique, avec des marchés en pleine croissance. Mais il est impératif de garantir que les centaines de milliers de jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail – 700 000, rien qu’à Madagascar par exemple – aient des perspectives d’avenir concrètes.
Cela passe par une formation adaptée aux besoins du marché. Le secteur privé a un rôle crucial à jouer pour structurer les filières, créer de l’emploi et recruter les jeunes talents. De notre côté, nous devons contribuer à renforcer les dispositifs de formation professionnelle et universitaire, pour qu’ils soient en adéquation avec les attentes des entreprises et les évolutions économiques.
“L’entrepreneuriat m’a appris le leadership, aujourd’hui je le mets au service de la jeunesse” – Andry Rajoelina
Issu du secteur privé, j’ai toujours été entrepreneur, et je le suis encore aujourd’hui. Cette expérience m’a permis, en tant que chef d’État, d’adopter des méthodes de gestion efficaces et surtout de développer un sens du leadership essentiel pour fédérer mes collaborateurs autour d’objectifs communs. Les responsabilités d’un chef d’État et celles d’un chef d’entreprise présentent des similarités, bien que l’échelle soit différente.
Face à la question : “Que fait-on pour la jeunesse ?”, je réponds avec conviction que l’accompagnement des jeunes est une priorité absolue. Ayant moi-même connu les réalités de l’entrepreneuriat, je sais combien il est difficile, notamment à Madagascar, d’accéder au financement quand on démarre. C’est pourquoi, dès le début de mon mandat, j’ai lancé le programme Fihariana, en collaboration avec les banques. Ce dispositif a pour mission de sélectionner et financer des projets portés par des jeunes, dans des secteurs clés comme l’agriculture, les technologies, ou encore le commerce.
Nous avons alloué 40 millions d’euros chaque année à ce programme, ce qui a déjà permis de financer 105 000 jeunes entrepreneurs à travers le pays. Certains ont même connu un véritable succès, notamment dans le domaine de l’exportation. Aider la jeunesse malgache n’est pas une option, c’est un devoir. Et même si l’accès au financement reste encore un défi, nous poursuivons nos efforts pour renforcer cet accompagnement et ouvrir davantage de perspectives aux jeunes.
Propos Recueillis par
Nambinina Jaozara