Explosion de la vente en ligne: Entre menace et développement de l’entrepreneuriat moderne

Toujours pas réglementée et parfois hors de contrôle, la vente en ligne continue de s’imposer dans le commerce à Madagascar.

Malgré la tentative de taxation en 2020, cette activité n’est aujourd’hui pas officiellement réglementée. Les grandes entreprises comme les petits commerces profitent ainsi de la puissance de la vente en ligne. En effet, publier des posts sur les réseaux sociaux reste plus abordable, tandis que coller des panneaux publicitaires à quelques millions n’est pas à la portée de tous les commerçants.

D’ailleurs, cette facilité d’accès profite aussi aux paysans et agriculteurs. De nos jours, ils peuvent annoncer la récolte et reçoivent des commandes via Facebook, ce qui réduit considérablement les contraintes. Facebook étant la plateforme en ligne la plus utilisée par la population malgache, de plus en plus de personnes, spécialement les jeunes, y passent beaucoup de temps. Viennent Tiktok et Instagram. Pour certains, ce n’est qu’une forme de divertissement, ils y sont pour poster des photos, gagner en likes et en popularité virtuelle. D’autres utilisent ces plateformes pour gagner leur vie.

“La vente en ligne offre beaucoup d’avantages. Pas besoin de local donc moins de charges. Je peux travailler de chez moi, toucher plus de monde, même ceux qui habitent loin. Et c’est disponible 24h/24, pas comme une boutique classique”, témoigne une commerçante.

Hausse du nombre d’internautes

En trois ans, le nombre d’abonnés Internet mobile a connu une croissance de 68,9%. Selon le Digital Report 2025, au mois de janvier, 20,4% des Malgaches sont des internautes, soit environ 6,60 millions de personnes. Bien que le taux de couverture réseau à Madagascar soit de 64%, cela n’a pas empêché le taux de consommation de données à Madagascar de doubler pendant ces deux dernières années. Dans sa majeure partie, cette population d’internet est composée de personnes de moins de 35 ans, dont près de la moitié des jeunes de 13 à 24 ans.

Et, depuis 2020, de plus en plus de personnes y ont trouvé une solution viable face à la crise du Covid dans ce tumulte d’échanges de produits ou de services via une plateforme internet. Pour la majeure partie, la vente en ligne se résume à revendre des produits d’importation de seconde main. Cela comprend à peu près tout : vêtements et accessoires, produits ménagers et cosmétiques, appareils numériques ou même encore des services et des comptes pour des abonnements TV… Scroller sur Facebook et tomber sur des “live shopping”, des “Arrivages”, des “Promotions” est devenu une normalité.

Mais la fiabilité n’est pas totale. Devenue une solution pour certains, la vente en ligne est aussi source de problèmes pour d’autres. En effet, l’identité de chacun peut être dissimulée sur les réseaux sociaux et beaucoup se cachent derrière cette possibilité d’anonymat pour en profiter et devenir des arnaqueurs anonymes. Il est donc important de rester vigilant. S’assurer de la fiabilité de son acheteur, vendeur et livreur est primordial avant chaque commande.

Vente en ligne et importations

Plus de 48 et 44 tonnes de friperies ont été respectivement importées en 2022 et 2023 et 2024 a encore vu une hausse de 12,5% de la friperie mise à la consommation. Ces cinq dernières années, Madagascar a compté d’énormes quantités d’importation.

Pour les trois premiers mois de 2025, la direction générale de la douane indique avoir enregistré 6.227,9 milliards d’ariary d’importation (tout produit confondus), en provenance de la Chine pour la plupart.

Cette tendance fait de Madagascar, une société de consommation, à la faveur de l’importation et de la vente de produits qui ne durent que le temps d’une saison. Imputer à la vente en ligne seule la responsabilité de la hausse de ces importations serait sans doute exagéré, mais force est de constater que les dates et les chiffres coïncident avec la montée en popularité de ce type de commerce.

Emplois connexes

Le business mindset (état d’esprit entrepreneurial) commence aussi à se développer avec cette explosion de la vente en ligne. Cependant, pour beaucoup, cela se limite à se faire un peu d’argent de côté ou à vendre des objets qu’ils n’utilisent plus. D’autres arrêtent toutes autres activités et font du commerce en ligne un véritable métier.

“Vendre en ligne, ce n’est pas juste poster une photo et attendre. Il faut s’investir. Il faut être régulier. Sans oublier de tout gérer : les stocks, les commandes, les messages, la qualité… C’est un vrai travail, c’est de l’entrepreneuriat”, explique-t-on.
“Ce qui est bien, c’est que de plus en plus de Malgaches se tournent vers les produits locaux. Ils veulent des produits naturels, simples, faits chez nous. Et je sens vraiment cet engouement. J’ai même des clients qui commandent depuis l’extérieur”, témoigne la propriétaire de la marque Miss Naturelle, une marque artisanale de produits capillaires. Même si les produits locaux sont noyés par les produits d’importations, en concurrence jugée déloyale pour l’artisanat, un changement de mentalité commence à s’opérer pour raviver la notoriété du Vita Malagasy, même si ce n’est encore qu’auprès d’une infime partie de la population.
La montée en force de cette forme d’entrepreneuriat réduit aussi, en quelque sorte, le taux de chômage dans le pays. Sans mentionner les vendeurs et revendeurs, qui ne peuvent ouvrir un local, ou bien ceux qui sont sur ces plateformes pour au contraire, faire connaître leurs locaux. A côté, la vente en ligne crée aussi du travail pour les livreurs de marchandises. D’autres en tirent profit en apprenant les fils du métier à ceux qui souhaitent s’y investir.
Cela étant, bien que la vente en ligne ait pris une telle ampleur dans la société actuelle, les méthodes de vente traditionnelles restent bel et bien présentes.

Aina Stephanie

Partager sur: