Mercredi des idées en goguette: Des portes à ouvrir

A la sortie d’une promotion d’un département à l’université d’Antananarivo, ré­cem­­ment, une internaute
a posé la question à milles balles. « Où vont- ils tous ces jeunes gens ?» Cette question est d’autant plus légitime que chaque année, la scène se répète avec la même solennité : remise de diplômes, toges bien repassées, larmes de joie et flashes d’appareils photo. Mais une fois les festivités passées, la vraie aventure commence, celle de la recherche d’emploi. Et là, pour beaucoup de jeunes diplômés, c’est la douche froide.

Et pour cause, le paradoxe est bien con­nu : plus il y a de diplômés, plus la compétition est rude… et plus l’attente d’un poste à la hauteur de leur formation devient longue. On ne compte plus les masterisés qui enchaînent les stages non ré­munérés au sein des dé­partements ministériels et dans le secteur privé. Pire, la surproduction de diplômés dans des filières peu connectées aux réalités du marché finit par saturer un système qui peine à se réinventer.

Prenons un exemple concret : la filière géographie. Dernièrement, les responsables au niveau de cette filière ont fait savoir qu’à l’université d’Ankatso, seuls 70 % des étudiants en master arrivent à soutenir leur mémoire. Parmi eux, moins de 40 % décrochent un emploi directement lié à leur formation. Pourtant, les compétences sont là, notamment en matière de cartographie, de gestion de projets, d’amé­nagement du territoire, d’analyse spatiale… Bref, un cocktail utile dans l’administration, les ONG ou le secteur privé. Alors, où est le bug ?

La réponse est multiple, il y a le manque de visibilité des profils, les concours aux critères parfois absurdes, les formations trop théoriques, et surtout, une faible articulation entre université et monde professionnel. La filière géographie n’est pas un cas isolé. Les lettres, les sciences humaines ou même certaines branches du droit font face à la même équation, c’est-à-dire beaucoup d’étudiants, peu de débouchés.

Mais tout n’est pas si gris. A titre d’exemple, du côté du tourisme, on observe un vent de re­nouveau. Il semble que l’Institut National du Tourisme et de l’Hôtel­lerie entame une modernisation ambitieuse à Ampefiloha avec l’appui de l’AFD. L’objectif est louable, donc former mieux, et surtout former utile. Plus de cuisine sans cuisine, plus de bar sans bar : le nouvel INTH aura des équipements à la hauteur des ambitions du pays en matière de tourisme. Voilà une ini­tiative louable car ce n’est pas le nombre de diplômés qui pose problème, c’est l’adéquation de leur formation avec un marché souvent figé et mal structuré.

En attendant une ré­forme en profondeur, les jeunes multiplient les initiatives : ateliers, échanges entre promotions, plateformes d’entraide… car être diplômé aujourd’hui, c’est avoir des clés, mais encore faut-il qu’il y ait des portes à ouvrir.

Rakoto

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