Des orchidées dessinées et façonnées avec un réalisme saisissant… et pourtant, ce ne sont pas de vraies fleurs, mais des créations pâtissières, prêts à être dégustées. Autour du stand d’Arena Henintsoa, au Salon de la Chocolaterie et de la Gourmandise, un beau monde se presse. Ses fleurs en sucre, délicates et raffinées, émerveillent les visiteurs, en particulier les amateurs d’art et de belles créations. Sa philosophie ? Trouver l’équilibre parfait entre passion, talent, besoin du monde et viabilité économique. Mais par-dessus tout, en tant que mompreneur, Arena est guidée par l’amour profond qu’elle porte à son fils. Elle partage son parcours pour encourager toutes les mamans à suivre leur propre chemin.
D’où l’idée de créer des fleurs en sucre vient-elle ?
J’ai toujours été passionnée par l’artisanat, un amour qui m’accompagne depuis l’enfance. J’ai grandi dans une famille d’artistes : mon grand-père maternel était un poète et dessinateur hors pair, et ma mère une couturière talentueuse. J’ai baigné dans cet univers artistique depuis mon enfance. Je me rappelle avoir toujours gribouillé des fleurs, que ce soit à l’école ou à l’université. Même lorsque je cousais, une activité que j’adore, je brodais souvent des fleurs sur les sacs et les vêtements que je réalisais.
J’ai découvert les fleurs en sucre en 2018, lors des préparatifs de mon mariage. Je voulais décorer mon gâteau avec des fleurs, mais sans utiliser de vraies fleurs naturelles. C’est alors que je suis tombée sur le travail d’une artiste spécialisée dans les fleurs en sucre. Dès que je suis entrée chez elle, j’ai su que c’était ce que je voulais faire. Cette idée ne m’a jamais quittée, et en 2022, j’ai enfin décidé de me lancer pour moi-même. Autodidacte, je me suis formée principalement sur internet, en regardant des vidéos et des tutoriels d’artistes que je suivais. Après deux mois d’apprentissage intensif, j’ai réuni tout le matériel nécessaire pour commencer cette aventure créative.
Pourquoi avoir décidé de transformer cette passion en entreprise ?
En 2020, à la naissance de mon fils, je faisais du télétravail. En 2022, j’ai dû retourner au bureau. C’est là que j’ai perdu cette joie de vivre : chaque matin, je devais quitter mon fils, le cœur lourd, pour ne le retrouver que le soir. J’avais l’impression de passer à côté de moments essentiels, de manquer quelque chose de précieux. La culpabilité m’accompagnait au quotidien. J’ai fini par parler à cœur ouvert avec mon mari. Je lui ai confié que je n’étais plus heureuse, que je ne me sentais pas épanouie. Ma vie était devenue une routine : je quittais la maison, je rentrais le soir, je passais un peu de temps avec ma famille avant de me coucher… puis tout recommençait le lendemain. Pourtant, je sais que j’ai des dons et des talents que Dieu m’a donnés, et j’avais cette impression d’être enfermée dans une vie banale, alors que je sentais au fond de moi que j’avais tellement plus à offrir.
Je lui ai demandé : “Si je devais envisager une reconversion professionnelle, est-ce que tu serais là pour me soutenir ? Est-ce que tu m’accompagnerais et me pousserais à aller au bout de mes rêves ?” Il m’a écoutée et m’a répondu qu’il me soutiendrait. Il m’a encouragée à chercher ce qui me passionne vraiment, et qu’ensuite, on verrait ensemble comment avancer. J’ai alors commencé une phase d’exploration : je me suis intéressée au maquillage, à la mode, à la couture, parce que j’aime créer des vêtements. Et un jour, alors que je cherchais un cadeau pour ma mère sur Instagram, je suis tombée sur un cake design orné de magnifiques fleurs en sucre. Ce fut une révélation. J’ai tout de suite su : c’est ce que je voulais faire.
Comment concilier vie de mère et chef d’entreprise ?
Ce n’est pas facile, car parfois je travaille encore à 23h30, et dès 5h du matin, je suis déjà debout pour préparer les commandes de nombreux clients. Mon enfant traverse une phase où il commence à comprendre que maman doit travailler. Malgré tout, je veille toujours à lui consacrer du temps, que ce soit pour jouer ou faire des activités ensemble. Nous avons aussi pris l’habitude de lui raconter une histoire chaque soir avant qu’il ne s’endorme. Je ne vous cache pas que ce n’est pas simple. Lorsque le volume de commandes baisse un peu, j’en profite pour l’emmener en escapade hors de la capitale. Aujourd’hui encore, je continue à chercher cet équilibre, et comme la vie est un apprentissage constant, les choses se mettent en place petit à petit.
Quel est votre plus grand défi en tant que mompreneur ?
Le plus grand défi pour moi, c’est de devoir parfois délaisser ma famille à cause de mes engagements. Pourtant, c’est aussi une immense source de motivation, car c’est avant tout pour mon fils, pour son avenir, que je me bats. Je veux façonner sa mentalité, lui ouvrir un chemin, lui montrer qu’il est possible de créer sa propre voie. Je suis convaincue qu’un jour il comprendra tout cela, et j’espère de tout cœur que c’est pour lui que je fais tout ça. J’ai eu la chance d’exposer mes œuvres au Salon du Chocolat au Carlton, et j’ai vu la fierté briller dans ses yeux en découvrant toutes ces magnifiques fleurs que j’avais réalisées. Il ne cessait de me dire “bravo”. A chaque fois qu’il me voyait préparer des commandes, il m’encourageait en me disant : “Bravo maman, tu es talentueuse”. Pour moi, c’est la plus belle des récompenses.
Travaillez-vous avec une équipe ?
Je gère seule l’ensemble du processus, de l’approvisionnement des matières premières à la création de contenu, en passant par la fabrication des fleurs en sucre, de A à Z. Pour la livraison, je délègue parfois, car ces fleurs sont très fragiles et, la plupart du temps, les clients viennent les récupérer eux-mêmes. Cependant, quand mon emploi du temps me le permet, je m’occupe personnellement des livraisons. Ma clientèle est composée d’amateurs de gourmandises et de belles choses raffinées. Je collabore notamment avec plusieurs pâtisseries de la capitale, ainsi qu’avec des mères de famille passionnées de pâtisserie qui préfèrent réaliser elles-mêmes leurs gâteaux, mais me confient la confection des fleurs en sucre. Mon public est donc très large, touchant tous ceux qui apprécient l’univers gourmand et raffiné.
Parlez-nous de votre quotidien d’artiste pâtissière.
En fin d’année, je reçois un grand nombre de commandes. Lorsque le volume est modéré, les clients passent commande environ deux semaines à l’avance, mais en période de forte activité, les réservations peuvent aller jusqu’à deux mois, voire six mois pour certains. Parfois, je suis même contrainte de refuser des commandes. La réalisation d’une seule fleur en sucre prend environ une heure. Plusieurs étapes sont nécessaires avant d’obtenir le résultat final : le moulage, la découpe, la mise en volume, la coloration des pétales selon les souhaits du client, l’assemblage, la touche finale, puis le parfumage. Je puise mon inspiration principalement sur Pinterest et Instagram, où je passe des heures à explorer des idées. Je m’inspire, mais je ne copie jamais entièrement ; j’adapte chaque création à ma personnalité et à mon univers. J’aime particulièrement créer des orchidées. Chaque réalisation est pour moi une aventure unique. Ce que j’apprécie dans cette fleur, c’est son côté majestueux, élégant et stylé. J’adore façonner et colorer ces orchidées avec soin.
Qu’est-ce qui vous motive dans ce métier ?
Je crois profondément en l’ikigai, ce concept japonais qui repose sur quatre piliers : ce que tu aimes, ce pour quoi tu es doué€, ce dont le monde a besoin, et ce qui peut te faire gagner ta vie. Aujourd’hui, je suis en chemin vers mon ikigai. Mon objectif dans tout cela, c’est aussi de créer un déclic chez mon enfant. Je veux qu’il comprenne qu’il n’est pas obligé de travailler pour les autres en tant que salarié pour s’épanouir, même s’il n’y a rien de mal à être salarié. On peut construire quelque chose de beau et de personnel en suivant ses passions. C’est une manière de lui transmettre une pensée positive, de l’encourager à s’épanouir dans plusieurs domaines, et surtout de lui montrer qu’on est épanoui quand on exerce une activité qu’on aime.
Quel message adressez-vous aux mamans à l’occasion de la Fête des mères ?
La force des mamans réside dans leur douceur, leur résilience et leur détermination. C’est cette force qui nous façonne, mais surtout qui façonne nos enfants. En cette Fête des mères, je vous invite à prendre un moment pour revoir le chemin parcouru. Soyez fières de tout ce que vous avez accompli, car cela influence la vie de vos enfants. Je vous souhaite beaucoup de courage pour assumer pleinement votre rôle de mère, car ce n’est pas toujours facile. Que vous trouviez la force nécessaire pour relever chaque défi. A toutes les mamans qui ont des projets, gardez courage et persévérez. Surtout, confiez-vous à Dieu dans votre vie, vos rêves, vos inquiétudes et vos espoirs. Si vous lui faites confiance, il vous guidera et ouvrira un chemin devant vous. Bonne fête à toutes les mamans !
Propos recueillis par
Nambinina Jaozara