Jonathan Ranjatoelina: “Mieux structurer la mobilité étudiante africaine”

Des milliers d’étudiants africains quittent chaque année leur pays pour poursuivre des études à l’étranger. Jonathan Ranjatoelina défend une vision panafricaine ambitieuse. Entrepreneur dans le secteur de l’éducation, il milite pour un accompagnement éthique, structuré et adapté aux besoins du continent. Entretien.

Dans quoi œuvre SAAN (Study Abroad African Network) Education ?

C’est une société qui ambitionne de structurer la mobilité étudiante en Afrique. Cela concerne 500.000 personnes. Ce sont des étudiants qui quittent leur pays pour étudier à l’étranger, la plupart part vers des destinations dites traditionnels comme l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Australie. Ensuite, vers l’Asie, tandis que la mobilité inter-Afrique reste très faible en termes de volume. Le panafricanisme est en vogue, aujourd’hui. C’est un sujet important pour l’autonomie et l’indépendance du continent. L’Afrique est le seul au monde qui va être en croissance démographique d’ici 2050, même celle de l’Asie va baisser. Pour l’heure, le réseau panafricain n’existe pas. Tous les réseaux structurés sur le continent sont soit européens soit nord-américains.

Comment cela va-t-il se passer concrètement ?

On aura ce qu’on appelle des “représentants”. Il y aura un interlocuteur par pays qui gérera les relations avec les étudiants. De notre côté, la mission est de développer les partenariats avec les écoles. Pour l’instant, nous sommes sur une vingtaine de pays d’Afrique, francophones, anglophones, lusophones et au Maghreb également. On leur propose ainsi d’avoir un seul interlocuteur sur le continent africain, au lieu d’en avoir un par pays et nous, on aura nos représentants. L’idée est d’avoir exactement la même offre dans tous les pays.

Quels dispositifs SAAN Éducation met-il en place pour accompagner les étudiants avant et après leur mobilité à l’étranger, notamment face aux risques liés à certaines écoles non reconnues ?

Dans un premier temps, il s’agit d’encadrer et de structurer. Cela veut dire travailler avec des écoles reconnues et avec lesquelles nous engageons notre réputation sur toute la politique de qualité de l’école. En effet, que ce soit à Madagascar ou sur le continent africain, un certain nombre d’étudiants sont victimes d’usurpateurs. On leur vend monts et merveilles et au final, ils n’en ont pas pour leur argent. Ici et à l’étranger, vous avez des écoles qui, en termes d’éthique, ne sont pas forcément au top niveau.

Nous sommes également attentifs sur toute la politique financière. Notamment, en cas de refus de visa chez nos jeunes où une très grosse partie de la somme qui a été versée est remboursée. C’est une exigence que nous avons vis-à-vis de nos partenaires.

SAAN éducation a été lancé il y a quelques jours. Mais elle travaille avec les étudiants depuis le mois de février. Nous ferons un premier chiffre pour la rentrée de septembre. Aujourd’hui, nous avons essentiellement des écoles basées en France mais nous sommes en train de nous développer sur d’autres écoles. Parallèlement, nous vendons aussi un programme anglophone à Barcelone et d’autres à Bruxelles.

D’après vos expériences, quels sont les niveaux et les filières qui sont les plus concernées par la mobilité ?

Nous avons beaucoup de généralistes. Ce sont les écoles de commerce classiques, tout ce qui est marketing, gestion ou management. Les écoles d’ingénieurs se développent également. Elles forment sur les métiers plus techniques, d’autant qu’à Madagascar, il y aura un vrai besoin dans les métiers en informatique.

Actuellement en Europe, les écoles spécialisées ont le vent en poupe. A titre d’exemple, on va proposer une école de management du sport et du luxe. L’objectif est de répondre à la demande du marché africain et de pouvoir combler les lacunes dans notre offre pour mieux satisfaire les besoins des étudiants. Pour l’instant, nous sommes sur six pays d’arrivée à savoir la France, la Belgique, la Suisse, le Royaume-Uni. En Amérique du Nord, nous aurons le Canada et les Etats-Unis.

Aujourd’hui, qu’est-ce qui bloque les étudiants à Madagascar en termes de mobilité ? Est-ce une question de niveau ou plutôt de moyen ?

Effectivement, les moyens financiers constituent un premier frein sur le marché. Beaucoup d’étudiants cherchent et obtiennent des bourses. Malheureusement, il n’y en a pas pour tout le monde. Par ailleurs, le niveau de prix d’études n’est pas le même, ne serait-ce que dans l’Union européenne. Les prix sont plus importants en Amérique du Nord. Aujourd’hui, certains pays sont également devenus plus vigilants au niveau de leur politique migratoire. On peut dire qu’il y a une véritable tectonique des plaques qui s’opère en fonction des pays et de leur stratégie. Il faut être attentif et voir comment cela va se matérialiser dans les prochaines années.

Combien de temps avant la rentrée faut-il entamer la procédure ?

Je dirai à la mi-mai. Nous traitons cela directement avec les écoles. Entre la candidature et l’admission, il n’y aura pas plus de trois semaines. Il faut noter qu’on n’aura que des écoles privées. Nous avons quelques concours à distance, mais en grande partie, ce sont des dossiers à fournir et entretien de motivation en français et une petite partie en anglais. Parce que même si vous suivez un programme francophone aujourd’hui, vous avez une partie des cours qui sont en anglais.

Tiana Ramanoelina

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