Un goût amer pour les produits de rente qui font la renommée de Madagascar partout dans le monde. Les conditions climatiques ont mis leur grain de sel et fait notablement baisser les exportations durant le premier trimestre de cette année.
La dernière note de conjoncture économique publiée par la Banky Foiben’i Madagasikara indique une baisse globale de l’exportation, de l’ordre de 11,9% par rapport à la même période de l’année dernière.
En effet, cette diminution se traduit par chute des recettes générées par des produits phares comme la vanille, le girofle et les produits issus de la zone franche. En ce qui concerne la vanille, les exportations ont enregistré une baisse de 45,3%. Cela est dû à la réduction du volume exporté et de la persistance, explique-t-on, d’un stock important à l’étranger, susceptible de freiner les nouvelles commandes. “Avec un stock à l’extérieur qui est assez important, il pourrait y avoir une réticence à acheter à Madagascar avec cette situation de frais supplémentaires”, explique un exportateur de vanille.
Par ailleurs, la situation de la filière est d’autant plus fragilisée par la récente décision de l’administration américaine. A rappeler que les produits en provenance de Madagascar pourrait être frappé d’un droit de douane de 47%.
Les États-Unis constituent le principal client de Madagascar pour ce produit. Car d’après les données, Madagascar a exporté 823 tonnes de vanille vers les Etats-Unis en 2022. Cette quantité a été de 434 tonnes en 2023, pour passer à 1.278 tonnes en 2024. Sachant qu’en 2024, les Etats-Unis ont importé au total 2.600 tonnes de vanille.
Mauvaise récolte
Mais le cas du girofle met la lumière sur autre une situation édifiante. Pour ce produit, les exportations ont reculé de 47,9%. Le responsable de ce constat est la est mauvaise condition climatique qui a fortement perturbé la production, indique la BFM.
Généralement, Madagascar parvient à produire chaque année près de 19.000 tonnes de clous de girofle. Une tendance à la hausse des productions a même été observé durant ces trois dernières années. Par contre, les opérateurs suggèrent plus de structuration pour la filière. Les plantations se répartissent dans les provinces de Toamasina, Fianarantsoa et Antsiranana, ainsi que dans la région Sud-est.
“Dans la région d’Analanjirofo, les producteurs de clous de girofle sont très nombreux. Ils maîtrisent bien les techniques de production, mais dans la majorité des cas, ils ne sont pas organisés et dépendent fortement des collecteurs. Et leurs méthodes restent artisanales”, explique un opérateur de la filière.
Il précise que les collecteurs jouent un rôle central en tant qu’intermédiaires entre les producteurs et les exportateurs. “Ils sont solidement implantés dans le tissu économique local et connaissent parfaitement les rouages du système. Grâce à leur capital et aux moyens logistiques dont ils disposent, notamment des véhicules, ils assurent l’achat et le transport des clous de girofle pendant la période de récolte, d’octobre à décembre.”
Selon cet opérateur, les collecteurs sont des acteurs incontournables, en particulier dans les zones enclavées où ils représentent souvent le seul lien entre les agriculteurs et les entreprises exportatrices, compte tenu de l’état déplorable des infrastructures routières.
“Ensuite, viennent les exportateurs. Ce sont de grandes sociétés titulaires d’un agrément leur permettant d’exporter les clous de girofle. Ce sont eux qui assurent le lien avec le marché international. A Madagascar, la consommation locale est très faible ; l’essentiel de la production est donc destiné à l’exportation, notamment vers Singapour, la France, les États-Unis ou encore Hong-Kong.”
Mais la filière est loin d’être exempte d’autres difficultés. “Il n’y a quasiment pas de contrôle dans la chaîne. Les plantations sont vieillissantes, peu renouvelées, et la qualité du produit malgache n’est pas toujours bien perçue par les importateurs, ce qui tire les prix vers le bas”, regrette l’opérateur qui à lui seul arrive à produire près de huit tonnes de girofles par an. Parmi les autres problèmes soulevés figure également la menace de l’Andretra, un insecte foreur du giroflier, et la culture sur brûlis, qui complique davantage la situation.
Un autre produit qui connais un ralentissement des exportations est celui issus de la zone franche. Une baisse de 2,5% est souligné par la note de conjoncture économique. Ceci explique par le ralentissement de la demande mondiale.
Le nickel et cobalt à la rescousse
A l’inverse, certains produits ont vu leurs exportations progresser. Le nickel a enregistré une hausse de 3,7%, tandis que le cobalt a connu une augmentation significative de 27,6%, soutenue par une forte croissance des volumes exportés. Ces performances sont notables malgré une conjoncture internationale marquée par la baisse des prix de ces matières premières. La note de conjoncture économique évoque également les perspectives à moyen terme en matière d’exportation, en identifiant les huiles essentielles et le cacao en fèves comme des produits à fort potentiel, susceptibles de jouer un rôle de levier pour la croissance des exportations.
Enfin, en ce qui concerne les importations, celles-ci ont connu une hausse importante de 27,2% au cours du même trimestre. En effet, la progression concerne presque tous les groupes de produits.
La hausse la plus marquée est observée dans les importations alimentaires, qui ont augmenté de 60,7%, notamment pour le riz (+172,0% en volume). Encore une fois, cette augmentation est surtout causé par des conditions climatiques défavorables ayant nui à la production locale, et par la volonté des autorités de prévenir une pénurie sur le marché intérieur.
D’autres catégories ont également connu une hausse, telles que les biens de consommation (+31,8%), les biens d’équipement (+21,9%) et les intrants destinés aux entreprises franches (+12,7%). En revanche, les importations de produits énergétiques ont diminué de 13,2% selon toujours la BFM.
Tiana Ramanoelina