La culture de la prévention ne semble pas une priorité dans le secteur de la construction. Pourtant, celui-ci constitue à la fois un pilier économique et comprend des métiers comportant certains risques. Il semble que l’adage “mieux vaut prévenir que guérir” ne soit pas bien appliqué dans ce domaine. Cette négligence se paie cher, car les accidents de travail et les maladies professionnelles représentent une charge pour les entreprises et compromettent leur croissance économique.
Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), en moyenne, 11% des accidents déclarés chaque année proviennent du secteur de la construction. L’Institut national de la statistique (Instat) indique également que, sur les 2.313 accidents du travail déclarés tous secteurs confondus en 2019, 288 concernent le secteur de la construction. Pourtant, ce dernier est l’un des plus rémunérateurs à Madagascar, se classant troisième parmi les secteurs d’activités à forte croissance. En 2019, il a généré 224 milliards d’ariary et employait plus de 200.000 travailleurs. Comment expliquer alors le manque de respect pour la santé et la sécurité au travail dans ce secteur ?
Selon l’OIT, le principal problème réside dans l’insuffisance de textes juridiques spécifiques applicables à la sécurité et la santé au travail (SST) dans le domaine du BTP. Ce problème a cependant été partiellement résolu par les acteurs du secteur du travail et de l’emploi lorsqu’ils ont travaillé sur le nouveau code du travail. La SST a été intégrée dans les textes pour remédier aux fréquents accidents de travail dans le secteur de la construction.
Ensuite, il existe également une disparité dans les exigences et les pratiques en matière de sécurité et santé au travail dans les projets de BTP. Selon les experts de l’OIT, les différentes entreprises n’appliquent pas les exigences en matière de SST, notamment dans le secteur de la construction. Seuls quelques employés disposent d’outils de protection, et même lorsqu’ils en ont, ils ne savent pas toujours les utiliser correctement, ce qui nécessite également une formation. Parallèlement, l’informalité et la précarité des emplois compliquent la mise en place de la SST dans les entreprises de construction, les entreprises informelles étant les moins respectueuses des normes de sécurité sur les chantiers.
Par ailleurs, l’OIT souligne également les contraintes financières et temporelles. La majorité des outils de protection sont offerts en dons par des organisations internationales et rarement des investissements des entreprises. Il y a également un manque d’attractivité du système de protection sociale ainsi qu’un manque de sensibilisation et de compétences des acteurs en matière de SST. Selon les données publiées par l’Instat, le nombre d’étudiants en BTP par année avoisine les 9.000. Cependant, seulement 21% des établissements d’enseignement supérieur en BTP disposent d’un module sur la SST, et pour ceux qui en ont, les cours sont uniquement théoriques. La SST n’est pas exclusivement intégrée dans les travaux pratiques.
Le manque de personnel parmi les inspecteurs et contrôleurs du travail n’aide pas non plus à la mise en place de la SST dans les entreprises. Selon les statistiques publiées par l’OIT, en 2021, le nombre total d’inspecteurs du travail s’élève à 200. Parmi eux, la répartition régionale montre que la direction régionale du travail dans la région Analamanga regroupe le plus grand nombre d’agents, avec 18 inspecteurs. Bon nombres d’entreprises sont en effet centrés dans cette région, ce qui nécessite plus d’agents de contrôle. L’effectif total des contrôleurs de travail est estimé à 183. La plupart d’entre eux sont également concentrés dans la région Analamanga, soit 23, mais ce chiffre reste néanmoins insuffisant pour couvrir toute la région. Leur rôle est d’assister les missions de contrôle dans les entreprises ou assister les inspecteurs de travail dans l’exercice de leur fonction.
La sécurité et la santé au travail est la discipline qui s’occupe de la prévention des blessures et des maladies liées au travail, de la protection et de la promotion de la sécurité et de la santé des travailleurs. Selon le ministère du Travail, de l’emploi et des lois sociales, la SST est l’un des points renforcés dans le nouveau code du travail afin de prévenir les accidents du travail, notamment dans les secteurs à haut risque comme la construction. L’Organisation internationale du travail soutient également l’État dans la sensibilisation et la formation des entreprises sur la SST. Parmi les actions entreprises, on peut citer la formation de plus de 2.000 employés en SST répartis dans tout le pays, ainsi que la distribution d’équipements de protection pour les travailleurs dans les secteurs à risque.
Nambinina Jaozara