Mamitiana Valéry Randrianonisoa, connu sous le pseudonyme de Val Knight, partage comment sa passion pour la lecture a influencé non seulement son parcours d’entrepreneur, mais aussi son rôle de père. Les livres occupent une place centrale dans son quotidien et celui de sa famille, et l’a poussé à fonder sa propre entreprise. Aujourd’hui libraire en ligne, il continue d’inspirer des milliers de personnes à travers la littérature et s’investit dans des projets liés au livre à Madagascar et en Afrique. Son histoire.
Pouvez-vous nous raconter comment est née votre passion pour les livres ?
Ma passion pour les livres a toujours été là, comme une évidence. J’ai grandi à Antsirabe, chez mes grands-parents paternels, dans une maison où les livres occupaient une place centrale. Notre bibliothèque familiale débordait d’ouvrages, et mon grand-père me faisait découvrir des trésors, notamment des bandes dessinées comme Tintin, qui ont marqué mon enfance. Lire n’était pas seulement une activité : c’était un rituel, un moment privilégié qui nourrissait ma curiosité et m’invitait à explorer des univers nouveaux. Lorsque nous avons déménagé à Antananarivo avec mes parents, cette habitude est restée intacte. Mon grand-père, fidèle à lui-même, n’oubliait jamais d’apporter un livre à chacune de ses visites, comme pour me rappeler que la lecture était un fil conducteur, un repère. À cela s’ajoutait la proximité avec ma tante, une grande passionnée de littérature, qui partageait volontiers ses découvertes et me parlait avec enthousiasme des histoires qui l’avaient marquée. Depuis, la lecture ne m’a jamais quitté. Elle n’est pas juste un passe-temps, mais une habitude ancrée, un besoin presque instinctif. Lire m’a toujours permis d’apprendre et de voir le monde sous un autre angle. Que ce soit pour trouver du réconfort, nourrir ma curiosité ou simplement savourer une belle histoire, les livres ont toujours été là. Et ils le seront encore, parce qu’ils font partie de moi.
Qu’est-ce qui vous a poussé à devenir libraire en ligne ?
C’est drôle à y repenser, mais tout a commencé par un refus. J’ai postulé pour un poste de libraire, et sans explication, ma candidature n’a pas été retenue. Sur le moment, c’était une déception, un doute qui s’installait : étais-je vraiment fait pour cela ? Puis, avec du recul, une question s’est imposée : Pourquoi attendre qu’on me donne cette chance, alors que je peux la créer moi-même ? C’est ainsi qu’est née l’idée de me lancer à mon compte. Au début, tout semblait incertain, mais j’ai décidé d’essayer, de commencer petit et de voir où cela me mènerait. Et puis est arrivée cette première commande—juste deux livres. À cet instant précis, quelque chose a changé. Ce n’était pas une grosse vente, mais ça représentait bien plus : une validation, une reconnaissance, la preuve que mon idée tenait la route. Je me suis dit : Je suis libraire. Ça y est, l’aventure a commencé. Ce petit pas a marqué le début d’un chemin qui, chaque jour, se construit un peu plus. Avec chaque livre vendu, chaque lecteur rencontré, chaque échange autour de la littérature, je me rends compte que cette passion mérite d’être partagée, et que parfois, les refus ne sont que le point de départ d’une histoire
Racontez-nous l’histoire d’Arena Library
Arena Library est une librairie en ligne, elle fête ses deux ans. Né le 7 mai 2023, ce projet est bien plus qu’une librairie, c’est une aventure passionnée où l’amour du livre rencontre l’élégance et le raffinement. Chez nous, chaque ouvrage est choisi avec soin, des éditions rares aux magnifiques reliures qui attirent les amateurs d’art, de littérature et de savoir. Mais Arena Library ne s’arrête pas aux livres. C’est aussi une référence en matière de liseuses électroniques, offrant un accompagnement personnalisé pour chaque lecteur curieux du numérique. Son univers s’étend encore, avec des télescopes pour explorer le ciel, des carnets hybrides dernière génération et bien d’autres trésors qui allient culture, science et esthétisme. Au fil du temps, Arena Library est devenue une source où la passion du savoir rencontre l’innovation, offrant aux lecteurs une expérience unique à la croisée de l’intellect et de l’émotion. Une aventure qui ne fait que commencer !
Le métier de libraire peut-il faire vivre à Madagascar ou est-ce juste une passion ?
Ma réponse est “Oui” ou du moins y contribue fortement. Ce n’est pas encore le cas pour moi aujourd’hui, mais j’en suis convaincu : avec du temps, des efforts et de la persévérance, ça viendra. Le chemin est parfois plus long pour certains, mais chaque étape compte et construit l’avenir de ce métier justement. Je crois sincèrement que le métier de libraire peut être une source de vie à Madagascar. Ce n’est pas juste une activité commerciale, c’est un moyen de partager, d’inspirer et de faire grandir une communauté de lecteurs. Avec passion et détermination, je sais que ce projet peut devenir une réalité et en ce sens, faire en sorte qu’il fasse vivre.
Quels projets ou actions avez-vous menés dans le cadre de votre engagement pour la culture et la littérature malgache ?
En 2018, j’ai créé un groupe de littérature sur Facebook qui regroupe des milliers de personnes. Dans ce groupe, nous échangeons nos avis sur les livres que nous lisons, nous organisons des concours, des rencontres, nous partageons nos connaissances autour de la littérature. J’ai ensuite été membre du conseil d’administration de la bibliothèque nationale en tant que représentant des usagers du livre. Une occasion pour moi, même si c’était à court terme, de promouvoir la lecture à travers l’action “Ndao hamaky boky” à l’époque. Actuellement, grâce à une initiative personnelle, Arena Library a pu rassembler une vingtaine de librairies en ligne, auteures, maisons d’édition et chroniqueuses—parmi elles, Boky & Co, Bookbliss, Tanou, Maison d’édition Jupiter, Je lis pour elle, Minitra Keliko, pour n’en citer que quelques-unes. Ensemble, nous œuvrons à la création officielle d’une association, et les démarches administratives sont déjà en cours. L’objectif est de mener des actions à court, moyen et long terme pour promouvoir la culture et la littérature (Malgache et autres), même à petite échelle et avec des moyens modestes. J’ai également eu l’opportunité de participer au comité de lecture du Prix Orange du Livre en Afrique de 2022 à 2024. Cette expérience m’a permis de découvrir la richesse et la diversité de la littérature africaine, ainsi que de contribuer à la promotion des talents émergents. Les deux livres que j’avais soutenus ont été des gagnants du prix.
Comment votre passion pour les livres influence-t-elle votre façon d’être père ? Partagez-vous cette passion avec votre famille ?
Les livres façonnent profondément ma manière d’être père. Ils m’apprennent la patience, l’écoute et l’importance du partage. Chaque histoire devient une occasion d’échanger, un moyen de transmettre des valeurs et de nourrir l’imaginaire. Avec notre fils, cette passion prend une place particulière. Les livres et les récits font partie de notre quotidien : nous lisons ensemble, nous lui racontons des histoires de notre enfance, et nous encourageons sa curiosité. Il passe beaucoup de temps plongé dans cet univers littéraire, et nous avons nos habitudes à Ambohijatovo, où nous aimons découvrir de nouvelles pépites. Il est même bien connu dans une librairie de la capitale ! Lire, c’est lui apprendre à observer, à questionner, à rêver… mais aussi à croire que ses rêves sont réalisables. Plus qu’un simple passe-temps, c’est un héritage, un lien fort qui nous unit et nous enrichit chaque jour.
Si vous deviez décrire votre rôle de père en trois mots, quels seraient-ils ?
Amour, bienveillance et éducation.
Quel est le livre qui a marqué votre vie de père ?
Le livre qui a marqué ma vie de Père est une lettre, c’est l’Épître de Jacques dans la Bible. Son message sur la patience, l’humilité et l’importance des actes résonne dans mon rôle quotidien auprès de mon fils. Elle m’a appris que l’éducation ne repose pas seulement sur les mots, mais sur l’exemple donné à travers les gestes du quotidien. Les valeurs de persévérance et de sagesse qui y sont enseignées m’inspirent à lui transmettre le goût du travail bien fait, la capacité à affronter les épreuves avec sérénité et la nécessité d’agir avec intégrité. Par la lecture et la réflexion autour de ces enseignements, j’essaie de construire un environnement où il apprend non seulement à rêver, mais aussi à bâtir concrètement son avenir avec foi et détermination. Ce texte me rappelle, jour après jour, que mon rôle de père va bien au-delà de l’encadrement : il s’agit d’une mission où chaque parole et chaque action peuvent influencer son chemin vers une vie équilibrée et pleine de sens. Pour terminer, je souhaite une très bonne fête à tous les pères et aux mères qui endossent ce rôle.
Propos recueillis par
Nambinina Jaozara