Dans le cadre du processus d’élaboration d’un Guide pratique sur la prévention et lutte contre la corruption en milieu carcéral, les enquêtes menées par la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH), dans plusieurs maisons centrales et de forces de la capitale et dans les régions (Matsiatra Ambony, Atsinanana et Sava), ont révélé l’ampleur de la corruption, au grand dam des personnes détenues et de leurs familles.
Ce n’est pas un secret pour personne. A Madagascar, la corruption est bien enracinée en milieu carcéral. Même pour jouir les droits fondamentaux, les détenus ou leurs familles doivent payer, sans pouvoir faire autrement.
« Le montant des pots-de-vin varie entre 100 à 2.600.000 ariary, en fonction des services rendus », a rapporté cette enquête dont les résultats ont été présentés officiellement, hier à l’hôtel Ibis à Ankorondrano, en collaboration avec l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) et financée par l’Ambassade de France.
« En général, l’ignorance de leurs droits, aussi bien chez les détenus que leurs familles durant la période de détention, favorise la corruption dans les établissements pénitentiaires », a soulevé le président de la CNIDH, Seth Andriamarohasina.
Selon des détails fournis, des détenus paient à partir de 100 ariary pour avoir accès à l’eau potable et à des toilettes. Ce montant peut atteindre 1.200 à 18.000 ariary, pour le droit de visite privé. En un mot, l’argent fait la loi en prison, car même le fait d’apporter de la nourriture coûte de l’argent aux familles des détenus, à raison de 15.000 ariary. Pour bénéficier d’une liberté provisoire, il faut compter jusqu’à 2.600.000 ariary.
La vice-présidente de la CNIDH, Prisca Andrianalivelo, a fait remarquer que « la corruption survient même durant la répartition des détenus dans les cellules ou encore lors des visites des familles qui soudoyaient les agents en échange de certains services qui devraient être fournis gracieusement.
Les agents pénitentiaires, pointés du doigt
Les enquêtes ont révélé que 71% des agents pénitentiaires sont corrompus dans la maison de force de Tsiafahy, 4% des détenus le sont et les 25% restants impliquent d’autres personnes en dehors du milieu carcéral. Pour la prison d’Antanimora, 76% des agents pénitentiaires et 12% des prisonniers sont corrompus.
Notons que l’objectif est de mener une campagne de sensibilisation sur la gratuité des services au sein des maisons centrales et des maisons de force, conformément aux « Règles Nelson Mandela ». Ce guide servira de référence pour aider les personnes cibles, en l’occurrence les détenus et leurs familles, à faire valoir leurs droits et les inciter à dénoncer toute forme de corruption.
Fahranarison