Un effet boomerang

Le dernier conseil des ministres a autorisé le recrutement de 4.000 hommes de troupe vo­lontaires pour renforcer l’armée malgache. Le principal objectif
de ce recrutement mas­sif est bien précis : lutter contre l’insécurité. Mais la question qui se pose est : Dans quel contexte vont-ils lutter contre cette insécurité ? En ville ou dans la cam­pagne ?
Aujourd’hui, on constate que les nouveaux incorporés sont tassés dans les casernes des grandes villes. Et vraisemblablement, ils ne participent pas, en aucune façon, à
la sécurisation de ces villes. Les rares patrouil­les de militaires ne sont visibles que lors­que la conjoncture po­litique est plutôt tendue.
Donc, on peut en dé­duire que c’est en milieu rural qu’ils seront plus utiles. Là-bas, ils pourront apporter plus de sécurité aux lo­calités ex­posées aux exactions commises par les dahalo et empêchant les villageois de produire en toute quiétude.
Mais une question se pose vu le nombre d’hom­mes de troupe qui vont être enrôlés. Il reste à savoir si tous ces hommes qui vont renforcer d’une manière sensible l’effectif de l’armée vont disposer d’un armement adéquat. Avons-nous les armes en nombre suffisant pour armer toutes ces nouvelles recrues ? Autrement, à quoi peut bien servir un militaire sans arme ?
Lors de ce conseil des ministres, on a également appris que leur incorporation sur contrat et sur la base du volontariat durera deux ans. Ils ne seront pas rémunérés mais nourris et logés par l’armée. Cette ab­sen­ce de toute forme de rémunération soulève des problèmes.
Effectivement, ces conscrits seront toujours à la charge de leur fa­mille respective car il y a toujours de petites dé­penses auxquelles ils devront faire face pendant leur incorporation (cigarettes, savons, crédits pour le téléphone…). Où trouveront-ils l’argent nécessaire ?
D’aucuns ignorent que pour beaucoup de ces jeunes gens, ils s’engagent pour ne pas rester à la charge de la fa­mille. Pour une très grande majorité des conscrits, ils sont issus du monde rural où le travail manque. L’armée est donc pour eux une so­lution, ne serait-ce que pour les deux années d’incorporation.
C’est la raison pour laquelle certaines nouvelles recrues ne manquent pas de faire de petits délits là où elles exécutent leur service militai­re. Mais pire encore, au bout des deux an­nées, s’ils ne sont pas réincorporés, ces jeunes vont revenir dans leur village d’origine et se retrou­vent dans la même si­tuation qu’avant.
Faute de travail, ils deviennent des dahalo à leur retour dans leur village d’origine. Mais ils sont plus dangereux car ils ont appris entretemps le maniement des armes et une notion, même élémentaire, de stratégie militaire. Autrement dit, cela risque d’avoir un effet boomerang.

Aimé Andrianina

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