Trois ans de service au sein de l’ambassade britannique à Madagascar et 25 ans de carrière au sein du ministère des Affaires étrangères britannique, David William Ashley entend assurer pleinement son rôle, celui de promouvoir l’amitié entre Madagascar et le Royaume-Uni. Dans une interview qu’il a accordée au Journal, le diplomate britannique nous livre les différents projets que son pays a entrepris et continue d’accomplir pour Madagascar.
-Les Nouvelles : Cela fera un peu plus de 3ans que vous êtes à Madagascar, quelles sont vos impressions sur le pays ?
* David William Ashley : C’est un beau pays avec une grande diversité culturelle. J’ai eu l’occasion de visiter plusieurs régions et je vais essayer d’en voir d’autres avant mon départ. Effectivement je serai en fin de mission d’ici la fin du mois de juillet. Mais j’ai encore 6 mois pour accomplir mes tâches. Le sens de l’accueil et la gentillesse des Malgaches m’ont énormément marqué depuis mon arrivée. J’ai remarqué cependant qu’une bonne majorité de la population ne parle que le malgache. Depuis, j’ai commencé à suivre des cours de malgache car il est important de pouvoir s’intégrer pour comprendre la population, mais c’est aussi une manière d’apprendre la culture. La langue est assez difficile à apprendre mais je trouve qu’elle est très enrichissante.
-Vous avez sillonné plusieurs régions du pays, lesquelles vous ont particulièrement marqué ?
*J’ai eu l’occasion de visiter l’Ikongo en septembre dernier. Elle fait partie des régions les plus pauvres et désenclavées de Madagascar. On a pu y voir les difficultés rencontrées par sa population. Les aides humanitaires britanniques y ont été très bien accueillies par la population en général, et par les enfants et les enseignants en particulier, notamment après la succession de cyclones. Je me rappelle également de ma visite à Ambanja où une ONG britannique était en action. C’était alors l’occasion de raffermir la collaboration entre les deux pays en matière de pêche et d’aquaculture. Dans tous les cas, c’est un honneur d’être le représentant d’un des plus anciens partenaires de Madagascar. Mon rôle est de promouvoir cette relation amicale et soutenir le développement de Madagascar.
-En parlant de collaboration, dans quels secteurs d’activités le Royaume-Uni et Madagascar se concentrent-ils ?
*Il y a quatre secteurs concrets qui définissent le partenariat entre les deux pays. D’abord, le Royaume-Uni œuvre dans le « Développement humain », notamment l’éducation, la santé et aussi la planification familiale. Je salue d’ailleurs le président de la République Andry Rajoelina pour son projet autour du planning familial. Il faut noter que grâce aux efforts fournis, nous avons pu éviter le décès de 1.400 mères et de 12.700 enfants, mais nous avons également évité 1.200.000 grossesses non désirées. Nous avons ensuite le volet « Environnement et changement climatique » où 22 projets sont actuellement en cours de réalisation. Nous avons également un programme sur les aires protégées. Il faut noter que Madagascar possède le plus grand nombre d’espèces menacées d’extinction sur les trois pays d’Afrique où la menace subsiste. Nous œuvrons également dans le « Commerce et investissement » mais aussi dans la « Démocratie et Gouvernance ». Sur ce point, nous soutenons la population malgache à trouver des solutions sur des situations données. Nous observons les élections, le financement de campagne mais nous œuvrons aussi dans l’éducation. Un programme est d’ailleurs en cours avec la société civile dans le secteur de la Gouvernance.
-Qu’en est-il de la Chambre de commerce Madagascar-Grande-Bretagne ?
*On a certes vu des augmentations du commerce entre le Royaume-Uni et Madagascar depuis 2022, mais cela reste toujours très faible en comparaison avec la France, l’Allemagne et les Etats-Unis. Le marché britannique est très ouvert aux produits malgaches. 100% des produits peuvent d’ailleurs entrer sans restriction d’impôts. Heureusement déjà, Madagascar exporte plus qu’on importe au Royaume-Uni, ce qui est une bonne chose. Nous avons un projet intitulé United Kingdom Trade Partnership (UKTP) depuis quelques années déjà, qui consiste en un soutien de 150.000 livres sterling pour les exportations malgaches. Il concerne particulièrement le textile et la chocolaterie, mais d’autres produits pourraient également y être intégrés, tels que le girofle.
-Divers projets ont été réalisés depuis votre arrivée, pouvez-vous nous en citer quelques-uns ?
*Oui certainement, plusieurs projets ont pu être achevés depuis, pour ne citer que la création de 11.000 postes dans le secteur textile à travers l’UKTP. Sur le plan humanitaire, le Royaume-Uni a déjà porté soutien à au moins 428 000 victimes de catastrophes naturelles dans le Sud et le Sud-est. Cela à travers l’Unicef, le Pam et la Croix-Rouge. Nous avons également pu envoyer 89 étudiants malgaches au Royaume-Uni grâce à la bourse « Chevening ». Il s’agit d’une bourse de Master et d’ailleurs des entretiens se tiendront dans les semaines à venir pour les postulants. L’ambassade a également pu organiser des expositions sur la relation bilatérale entre les deux pays en 2022 dont l’une était à Antsiranana et l’autre à Antananarivo. Nous espérons pouvoir organiser une autre à Toamasina prochainement.
-Les dates des législatives et communales ont été présentées par la Ceni, comment voyez-vous le contexte politique, particulièrement après la présidentielle de 2023 ?
*Personnellement, je trouve assez décevant que la présidentielle n’ait pas été totalement inclusive car l’opposition a boycotté la campagne électorale. Nous avons fait le maximum pour soutenir le processus. Nous espérons que toutes les parties seront présentes lors des élections à venir. Cela étant, les électeurs devraient y participer activement et décider de l’avenir de leur pays. En effet, moins de 50% des électeurs sont allés aux urnes l’année dernière. Cependant, une trentaine de recommandations ont été apportées par les observateurs internationaux, il est important que les parties prenantes puissent les considérer aux fins d’améliorations.
-Des changements ont-ils eu lieu ?
*Les tensions autour des élections ont diminué et j’espère que tout le monde participera aux élections cette fois. Néanmoins, le gouvernement devrait tout mettre en œuvre pour garantir la participation de chacun. Nous espérons tous que les législatives se passeront mieux.
-Un petit commentaire sur le procès impliquant l’ex-directrice de cabinet de la Présidence qui se tient actuellement à Londres ?
*Tout ce que je peux dire sur le sujet, c’est que les institutions judiciaires sont totalement indépendantes du Gouvernement. Je suis le procès à travers les médias comme tout le monde. Mais je peux vous assurer que la décision de la Cour sera absolument indépendante. Nous verrons la suite…
Propos recueillis par Tahina Navalona