Flagrant désintéressement

Comme les temps ont changé ! Les images sont encore toutes fraiches dans la mémoi­re quand on se remémore les célébrations dans le faste, dans le temps, de chaque 1er mai dédié à la Fête du travail avec le célèbre slogan : « Travailleurs de tous pays, unissez-vous ».
A Madagascar, cette célébration a atteint son apothéose sous la pé­riode socialiste. La couleur rouge « révolution­naire » dominait alors toutes les autres couleurs. Défilés, carnavals… tout a été mis en œuvre lors de cette célébration. Que ce soit le secteur privé ou le secteur public, tout le monde y participait.
Aujourd’hui, mise à part que ce soit un jour férié, c’est à peine si l’on remarque que l’on célèbre la Fête du travail. Les rues de la capitale sont toujours pleines de mon­de comme à l’accoutumée mais ce n’est pas pour y défiler mais plutôt vaquer aux occupations quotidiennes.
On remarquera d’ail­leurs que la plupart des magasins de vente (no­tamment ceux tenus par les Karana) sont restés ouverts. Les gens en ont alors profité pour faire des achats ou tout juste de la lèche-vitrine. Il faut reconnaître que la célébration de la Fête du travail était le moindre de leur souci.
Cela se comprend parce qu’on peut dire que même les premiers con­cernés ne s’y intéressent pas. La raison est que ces travailleurs n’ont pas le cœur à célébrer une journée dédiée au travail quand les fruits de ce travail ne leurs suffisent pas pour joindre les deux bouts.
En effet, le niveau de salaire actuel conjugué avec l’inflation n’accorde guère de marge de manœuvre aux travail­leurs salariés pour vivre décemment. Ils éprouvent toutes les peines du monde pour faire vivre leur progéniture respective.
De toutes les façons, il serait incongru de célébrer la fête du travail avec faste quand une partie non négligeable de la po­pulation se trouve dans le chômage, bien des fois déguisé. Il n’y a qu’à regarder les nombreuses personnes qui déambulent dans les rues sans but précis comme perdues dans leur pensée.
Il ne faut pas penser que toutes ces personnes ne veulent pas travailler. Loin de là s’en faut. C’est le travail qui manque. Le marché du travail à Madagascar est trop restreint pour pouvoir tous les intégrer. Bien évidemment, ceux qui ont du travail ont tous les droits du monde de faire cette célébration. Tant mieux pour eux.
Mais pour tous ceux qui sont laissés pour compte, c’est un véritable chemin de croix que d’aller chercher du travail par le temps qui court. Dans ces conditions, de la part de la population, il ne faut pas chercher loin pour comprendre, pourquoi, par rapport à la Fête du travail, il y a ce flag­rant désintéressement.

Aimé Andrianina

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