« Ô tempora, ô mores »

A partir de 22 heures, les rues de la capitale commencent à être désertes. Seules quel­ques rares voitures et motos viennent rompre le silence. Quant aux piétons, il n’y en a plus. Passé minuit, c’est le silence total. On pourrait penser que le confinement est de nouveau de rigueur.
Pourtant, jadis la capitale était réputée pour son animation, même toute la nuit. La vie nocturne de la capitale a bien changé dans le temps. Seuls quel­ques endroits bien con­nus de tous parviennent tant bien que mal à entretenir cette réputation de ville animée. Mais cela n’a plus rien à voir avec le passé.
Cela se comprend avec l’insécurité qui règne partout dans la ville, voire dans tout le pays. Aujourd’hui, on ne peut plus sortir faire une virée nocturne que si on n’est pas escortés par quelques malabars ou qu’on soit armé. Seuls quelques individus peuvent se le permettre.
Et si cette vie nocturne vous manque vraiment, tout au moins, il faut choisir les endroits fréquentés où on peut trouver beaucoup de monde. D’ailleurs, ne dit-on pas que plus on est nombreux, plus on s’amuse. Les coins isolés sont propices aux atta­ques nocturnes.
Mais le grand incon­vénient des endroits très fréquentés est que les ris­ques d’altercations aug­mentent, l’alcool aidant. Des altercations qui peuvent se transformer en rixes, voire en bataille rangée. Et il n’est pas exclu que des coups de couteaux soient distribués ici et là. Et des fois, on assiste à l’usage d’armes à feu.
Dans de telles circonstances, même si on n’est pas directement impliqué dans une altercation de ce type, on a toujours à craindre les éventuelles balles perdues ou les coups de couteau donnés aveuglement. Et une soirée programmée pour le divertissement peut finalement se terminer en tragédie.
Il fut un temps où, après avoir assisté aux cours du soir (de 17h à 19 h) à l’université d’An­tananarivo, on pouvait rentrer à pied d’Ankatso jusqu’aux cités des 67 Ha quand le dernier bus est déjà parti sans le moindre risque d’agression. Autre­ment dit, on traversait toute la ville d’Antana­na­rivo d’Est en Ouest.
Faut-il préciser que ces cours du soir étaient organisés pour les travailleurs qui voulaient encore poursuivre leurs études professionnelles ou encore les étudiants qui suivaient en même temps 2 ou 3 filières. Dans le temps, c’était possible et les étudiants en profitaient au maximum. Ces cours étaient complétés par ceux dis­pensés le matin entre 6h et 8 h.
Aujourd’hui, ce serait vraiment insensé de faire cette marche car on risque d’y perdre si ce n’est pas la bourse, c’est la vie. Bien évidemment, les nostalgiques du bon vieux temps ne manqueront pas de se dire, dans un soupir : « Comme le monde a changé ». Ô tempora, ô mores.

Aimé Andrianina

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